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readpositive
Description du blog :
Y avait Drink positive *, dorénavant Read Positive *
Catégorie :
Blog Littérature
Date de création :
01.05.2010
Dernière mise à jour :
12.09.2010
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· Chapitre 4 : L'arbre Menoa
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· Chapitre 5 : La rencontre
· Chapitre 1 : Calyst
· chapitre 2 : La fin d'une enfance misérable (2)
· Chapitre 7 : Mauvais départ (2)
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· Chapitre 1 : Calyst (2)
· Chapitre 5 : La rencontre (2)
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· Chapitre 7 : Mauvais départ
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angela arya calyst contrat elva eragon islanzadi kean murtagh nasuada orik oromis
Derniers commentairescette fic est passionnante !
j'ai adoré la rencontre de murtagh et de calyst !
penses-tu écrire une suite ?
Par Anonyme, le 15.12.2011
salut super fic, et on veux la suite ! ^^
Par Anonyme, le 13.04.2011
salut super fic,et on veux la suite ! ^^
Par Anonyme, le 13.04.2011
on veut la suite !!!!!!http://h ugi.centerblog .net
Par Anonyme, le 24.02.2011
Suite chapitre 7
A la fin de la journée, la jeune femme monta les marches et se chargea des sacs dans le monte-charge. Elle se remémora les leçons de Thorn sur la résistance aux intrusions mentales et ouvrit la porte du dragon noir. Elle lui jeta un rapide coup d’œil et le vit recroquevillé dans un coin sombre de la pièce. Elle entra rapidement, déposa le sac de viande et ressortit à la même allure en claquant la porte. Un rugissement retentit, signe de la frustration de Shruikan, et le plancher se mit à trembler. La jeune fille grimaça et ferma les yeux avant de se diriger vers l’abri de son ami ailé. Lorsqu’elle se pencha pour prendre le second sac, une douleur lui transperça le ventre. Elle souleva sa chemise et remarqua un bleu sur ses côtes. Le choc de tout à l’heure avait du être plus violent que prévu. Le souvenir de sa dispute remonta à la surface et c’est dans un état de rage pure qu’elle entra dans la pièce et se tourna pour poser le sac à terre tout en grommelant mentalement :
« Non mais franchement, y a des gens ici ! Je me suis fait renversée par un gars prétentieux au possible ! Il était vraiment… »
« Calyst ! » l’avertit mentalement le dragon .
La jeune femme se retourna, furieuse d’avoir été interrompu lorsqu’elle vit que le dragon était harnaché. Près de lui se trouvait…
« Mince !» pensa la jeune femme en se mordant les lèvres.
…le fameux prétentieux !
-…très mignon ! lâcha Calyst d’un ton faussement enjoué, achevant sa dernière phrase.
Elle se rendit alors compte qu’il n’avait du entendre que « très mignon » car le reste n’avait été qu’une conversation mentale entre elle et Thorn. Il la regardait, abasourdi, la détaillant de bas en haut. Calyst ne put s’empêcher de s’infliger mille tourments en pensée. Ils venaient sans doute d’arriver car le jeune homme était en train d’enlever la selle du dos du dragon.
« C’était pas un serviteur ! C’était le Parjure ! »
« Au secours Kean ! »
***
Il ne comprenait pas. Qu’est ce qu’elle fichait ici, elle ? Il l’avait vu balancer le sac de viande sur le côté, donc c’était sans doute elle qui nourrissait les dragons. Ce qu’il ne saisissait pas, c’était son expression détendue lorsqu’elle était entrée. Aucune trace de peur, plutôt une colère non dissimulée et puis les mots qu’elle avait dit lorsqu’elle l’avait aperçue n’avaient aucun sens. Il regarda Thorn qui fixait la jeune femme. Il n’eut alors aucun besoin de lire dans son esprit pour que toutes les pièces du puzzle s’emboîtent :
« Eh bien c’est-à-dire qu’elle vient me nourrir tous les jours et… » hésita le dragon.
« Quoi ? »
Murtagh voulut alors voir dans l’esprit du dragon qui était cette fille mais il l’en empêcha.
« C’est inutile, Murtagh, ne m’en veux pas ! »
« Je croyais qu’on ne se cachait rien ! »
« C’était le cas, se justifia le dragon, avant qu’elle n’arrive ! Ce n’est pas une ennemie ! »
« Mais qu’est-ce que tu en sais ? » hurla Murtagh.
Il bouillait de rage. Comment avait-il osé lui cacher ça ? Depuis combien de temps cela durait ? Pourquoi il s’était laissé embobiner ? Le dragonnier se sentait mal et nauséeux. Une sensation de trahison s’insinua en lui tel du poison. Thorn, son ami, son confident, sa moitié lui avait menti ! Sentant son trouble, le dragon intervint d’une voix apaisante :
« Je ne te trahirais jamais, bonhomme ! Je t’aime et crois-moi pour un dragon, cela veut dire beaucoup ! Je ne te demande qu’une seule chose : Parle-lui. Elle t’expliquera d’elle-même et je te jure qu’elle est là pour nous aider ! Uniquement pour nous aider ! La connaître et lui parler ne remet pas en cause nos serments, alors ne la livre pas à Galbatorix sous prétexte que vous vous êtes bousculés dans un couloir ! »
« Pour qui tu me prends ? »
Le jeune homme se renfrogna. Le ton rassurant mais suppliant de son dragon le faisait douter et il devait avouer qu’il souhaitait savoir qui elle était. Et puis Thorn avait sûrement du fouiller son esprit. Il ferait pareil de toute manière, comme cela, il éviterait les mauvaises surprises :
« Je te prends pour quelqu’un de têtu, borné et rancunier mais je te sais intelligent ! Tout comme elle, d’ailleurs, vous devriez bien vous entendre ! »
Le dragon s’approcha du fond de la pièce où se trouvait une ouverture sur le ciel. C’est alors que la jeune femme jusqu’ici silencieuse, s’exclama :
- Où tu vas ?
« Ne me laisse pas toute seule ! » supplia-t’elle mentalement.
Le dragon répondit de telle sorte que les deux humains puissent entendre :
« Vous avez à parler tous les deux, je préfère vous laisser ! »
Il s’adressa à Calyst d’un ton réconfortant :
« Il ne va pas te tuer ! »
Puis à Murtagh, en lui adressant un regard lourd de sous-entendu :
« Ne la tue pas ! »
Tous deux grognèrent et regardèrent le dragon prendre son envol et s’éloigner. En vérité, Thorn ne souhaitait pas assister à leur explications, qui au vu de leurs caractères emportés, pourrait bien dégénérer en véritable irruption volcanique.
***
Un silence tomba. Aucun d’eux ne prit la parole, trop occupé à se jauger l’un l’autre. Murtagh la regarda d’un œil critique. Elle était plus petite que lui mais semblait avoir son âge. Une cascade de cheveux noirs lui tombaient au milieu du dos et, malgré les haillons qui la couvrait, il devinait une silhouette finement musclée. Le garçon se maudit : lui, si méfiant d’habitude et toujours aux aguets, il aurait du le remarquer lors de leur percutante rencontre. Ce n’était sûrement pas une servante. Malgré la poussière qui lui couvrait le visage, ce dernier étant plutôt fin d’ailleurs, elle aurait été agréable à regarder si elle ne l’avait pas fixé de ses yeux flamboyants. Drôle de regard d’ailleurs. Ils étaient assez proches pour que le dragonnier remarque la singularité de ses yeux : bleus pailletés d’or, vraiment étrange. Comme elle ne disait rien, le dragonnier commença :
« - Comment tu t’appelles ?
La jeune femme le fixa avant de répondre d’une voix froide :
- Je suis Calyst la rôdeuse…inutile de me dire le tien, tu es célèbre !
Le ton virulent qu’elle employait acheva de convaincre Murtagh qu’il ferait mieux de la livrer au roi. En quoi cette fille qui, visiblement, le détestait pouvait-elle l’aider, lui et son dragon ? Ridicule ! Lorsque Thorn reviendrait, il lui ferait la leçon. Il ne fallait pas se laisser embobiner par la première venue, c’était se faire de fausses illusions et une assurance pour des espoirs brisés. Soudain, la rôdeuse reprit d’une voix plus calme :
- Désolée…C’était pas très malin de ma part.
Murtagh la regarda, surpris. La réplique de la jeune fille ne l’avait pas étonné outre-mesure car tout le monde avait ce réflexe en apprenant qui il était. En revanche, personne ne s’en excusait juste après. Il sourit intérieurement. Elle s’était excusée et même si ce n’était pas sincère, ça méritait au moins réflexion et un peu de son temps. Il soupira et fit un geste évasif avant de reprendre :
- Que viens-tu faire ici, Calyst la rôdeuse ?
Elle tiqua à l’évocation de son nom avant de répondre :
- Ce que je vais te révéler, j’y ai longuement réfléchi. Thorn m’a appris mot pour mot la signification de vos serments, ce qui m’a permis de choisir mes mots avec soin.
Le dragonnier jura contre son dragon. Il savait que Thorn voulait bien faire et qu’il ne souhaitait que son bonheur mais tout ça ne leur apporterait que des ennuis.
- Donc, poursuivit la rôdeuse, je sais que cela n’engage en rien ta « fidélité » au roi. Alors si jamais tu me livres, cela voudra dire qu’Eragon et Nasuada auront eu tort de te faire confiance.
- Eragon et Nasuada ?
Le dragonnier avait pâli ce qui n’avait pas du échapper à la rôdeuse. Devant son agitation, Calyst voulut l’apaiser :
- Je ne sais absolument pas où il est, ni ce qu’il fait !
Murtagh sentit soudainement le changement qui s’opérait en lui. Prononcer le nom d’Eragon réveillait cette fichue malédiction.
- Mon serment…gémit-il.
Il grimaça lorsque la douleur s’insinua lentement en lui. Une épine douloureuse lui tenaillait la tête et son bras commençait à agir tout seul. Il voulut dire à la jeune fille de s’éloigner mais Calyst s’approcha de son oreille et murmura en ancien langage :
- Je ne sais pas où il est, je le jure !
Le dragonnier sentit alors la présence étrangère se retirer douloureusement de son corps et il tomba à genoux, haletant :
- Comment…comment est-ce possible ?
La rôdeuse le regarda, un petit sourire au coin des lèvres.
- Thorn m’a dit que tu aurais cette réaction dès que j’aurais prononcé le nom de ton frère. Il m’a dit que tu serais obligé de me poursuivre tant que tu ne serais pas sûr que je ne mentais pas en disant que j’ignorais où il était. Alors il m’a enseigné cette phrase en ancien langage.
Elle le regarda anxieusement :
- Tu sais que je ne mens pas, hein ?
- …oui, lâcha Murtagh dans un souffle.
- Et tu comptes me livrer au roi ?
- Non sauf si tu continues à poser des questions stupides…
- Je compte continuer à les poser si tu ne parles pas plus que ça.
Murtagh soupira. Les effets du serment se faisaient encore sentir et il s’assit sur le sol, prenant appui contre une poutre en bois. Calyst attendit que le malaise soit passé avant de reprendre d’un ton las :
- Bon, les présentations sont faites et tu as appris ce qui risquait de me causer le plus d’ennuis. Devant ton absence total de réaction (le garçon voulut protester mais elle enchaîna rapidement : ), j’estime ne plus être en trop grand danger !
Murtagh détourna les yeux et demanda :
- Qu’est-ce qu’Eragon et Nasuada viennent faire dans la conversation ?
- Ce sont mes commanditaires, Répondit simplement la jeune fille.
Le dragonnier ricana :
- Tes commanditaires ?
- Qu’est-ce qui te fait rire ? répliqua Calyst, cinglante.
- Rien. Je me demande juste ce qu’ils ont bien pu te demander.
- Devine petit malin ! répondit ironiquement la rôdeuse. Mais enfin, tu es bête ou quoi ? Ton frère et Nasuada m’ont demandé de t’aider…
Le dragonnier serra les poings sous l’insulte mais la suite de la phrase l’intrigua.
- M’aider ?
- Oui, t’aider ! Te parler serait sans doute plus exact. Ils m’ont demandé de récolter des informations sur vos serments afin que ton frère trouve un moyen de te libérer.
- Il veut me libérer ?
- C’est si surprenant ?
Oui, ça l’était surtout après ce qu’il avait fait aux plaines brûlantes. Et Nasuada devait le haïr, elle, une des rares qui ne l’avait pas jugé sur son lignage et avait accepté d’être son amie. Et son petit frère…Le jeune homme soupira :
- Le seul moyen de me libérer, c’est de tuer le roi ! C’est impossible, dis-lui qu’il perd son temps !
- Tu rêves ! protesta Calyst avec sérieux. On me paye très bien pour trouver un moyen (qui n’existe pas, d’après toi) alors ne compte pas sur moi pour ça !
Mais mince à la fin, c’était quoi cette fille ? Elle avait toujours réponse à tout et dès qu’une occasion se présentait, elle l’insultait. Murtagh releva la tête et répliqua :
- Je récapitule : tu es agressive, menteuse, attirée par l’argent, égoïste, et malhonnête. Tant de qualités pour si peu de défaut, ajouta-t’il d’un ton moqueur. Les Vardens sont tombés bien bas pour faire appel à toi !
Les yeux de Calyst flamboyèrent et elle riposta d’un ton venimeux :
- Moi, je me demande encore comment ils peuvent avoir envie de sauver un gars comme toi, aussi prétentieux et lâche ! Je préfèrerais encore aider ton dragon, figure-toi !
Murtagh se releva d’un coup et fit face à la rôdeuse, le visage noir de rage :
- Prends bien garde à ce que tu dis, Menaça lourdement le jeune homme. Tu juges les gens sans même les connaître ! Avant même de me parler, tu avais déjà une idée bien précise de ce que j’étais, un gros lâche et prétentieux apparemment ! Comment pourrais-tu m’aider si tu ne comprends pas ce qui nous arrive à Thorn et à moi !
Il ne se rendit même pas compte qu’il criait mais Calyst rétorqua violemment :
- Et toi ? Tu oses me donner des conseils sur les jugements mais tu étais si abattu par ta situation que tu n’as pas daigné m’accorder une seule seconde de réelle attention ! Je suis égoïste ? Parfait, on est deux ! Tu n’imagines même pas ce que représente cette mission pour moi ! Tu ne cherches pas non plus à savoir ce qui a pu m’arriver pour en être réduite à être ici à te sauver TOI, dans cet état lamentable ! » dit-elle en désignant ses haillons.
La jeune femme tourna alors les talons et sortit rapidement en claquant la porte. Murtagh esquissa un geste rageur et balança un coup de pied dans une botte de foin qui traînait sur le sol. Il jura longuement et ne put s’empêcher de laisser éclater sa colère par un long cri de rage avant de se laisser tomber sur le sol. C’est le moment que choisit Thorn pour revenir. Devant l’état de son ami, il soupira :
« Bonhomme… »
« Comment as-tu pu te laisser embobiner par elle ? Tout ce qu’elle veut, c’est de l’argent, elle s’en fiche pas mal de nous ! »
« Et alors ? Pour pouvoir toucher son argent, elle doit réussir sa mission et crois-moi, c’est la meilleure assurance pour qu’elle ne flanche pas. Elle se fiche de toi ? Et toi, que penses-tu d’elle ? »
« Elle est insupportable, voilà ce qu’elle est ! hurla le dragonnier. Toujours à tout savoir mieux que tout le monde ! »
Le dragon se tut, le laissant évacuer sa colère. Dans ces moments-là, Murtagh était violent et sujet à des accès de rage qui ne se calmaient qu’une fois sa frustration épuisée. Il songea à Calyst. Ils avaient du rivaliser de méchanceté tous les deux pour le mettre dans cet état et il n’osait même pas imaginer dans quelle situation se trouvait la rôdeuse.
« Mais quel abruti fini celui-là ! »
« Tu n’y as pas été de main morte non plus, à ce que j’ai entendu ! »
« Ferme-là, Kean ! » le rabroua la rôdeuse.
Ils avaient élu domicile dans une pièce vide et poussiéreuse et la jeune fille ne pouvait s’empêcher de faire les cents pas pour tenter de se calmer. Sa créature la suivait du regard, assis sur son derrière de ouistiti bleu.
« Zut ! »
« Si cette mission est aussi pénible pour toi que pour moi, rentrons fillette ! Tu diras à Nasuada d’envoyer quelqu’un d’autre… »
« Pas question ! » le coupa Calyst. Elle s’arrêta net et s’approcha pour fixer Kean droit dans les yeux.
« Tu sais ce qui se passera pour le clan si je n’achève pas cette mission ! Et je ne veux même pas imaginer la réaction de mon père !»
Sa voix se brisa et elle se détourna. Kean grogna doucement pour la rassurer. Il attendit quelques instant que l’émotion soit passée puis demanda :
« Que comptes-tu faire ? »
« On ne change rien. Tu continues de récolter les infos et moi…j’essaierais de retourner le voir, en priant pour que Thorn l’ait calmé. »
« Ca ne suffira pas… »
« Je vais aller m’excuser ! »
Le petit singe ouvrit de grands yeux :
« T’excuser, toi ? »
« Oui…dit-elle en baissant les yeux, il n’avait pas à me balancer des choses pareilles mais il y avait du vrai dans ce qu’il a dit. J’avais déjà mon idée sur lui avant de le rencontrer. Je n’ai pas été professionnelle sur ce coup-là ! »
Elle regarda Kean avec un petit sourire sadique.
« Et il va être temps que je te présente ! »
« Quoi ? Pas question ! »
Le singe dégringola de son perchoir et se cacha dans une cruche en terre qui traînait sur le sol.
« Kean…Je veux leur montrer qu’on ne leur cache rien, qu’on est de leur côté ! »
« Trouve-autre chose ! »
« Je n’ai pas autre chose ! Malgré son caractère de chien, Murtagh veut la même chose que nous. Qu’on le libère ! J’en suis sûre, ça se voyait malgré tout ! Et puis, il n’a pas encore fouillé dans mon esprit parce qu’il était surpris mais la prochaine fois, je ne pourrais rien faire. Et les informations que je dois absolument cacher laisseront les autres à sa merci. Comme ton existence… »
Le singe grimaça et poussa des petits cris plaintifs. Calyst soupira avant de le prendre délicatement contre elle pour le rassurer :
« Heureusement que tu es là… »
« Heureusement qu’on est bien payé aussi ! » dit maladroitement la créature.
« Aussi… » sourit la rôdeuse.
Elle le déposa et se dirigea vers la porte.
« A tout à l’heure… »
Murtagh renversa sa tête en arrière, regardant Thorn qui le fixait. Il venait de lui raconter leur dispute dans les moindres détails et attendait la réaction de son ami. Ce dernier soupira :
« Je me doutais que ça finirait comme ça… »
« Si tu t’en doutais, pourquoi nous avoir présenté ? Elle est tellement… insolente ! »
« Insolente ? » sourit le dragon.
Le garçon se rembrunit :
« Oui, insolente ! »
« Parce qu’elle te tient tête ? »
« Pour beaucoup de raisons, Thorn. Tu es de quel côté à la fin ? »
Le concerné posa ses yeux noisette sur le jeune homme.
« Du tien, bonhomme. Et je maintiens que cette petite peut nous aider. Tant pis si tu ne l’aimes pas ! »
« C’est le cas ! » grogna Murtagh.
Le dragon laissa échapper de la fumée de ses naseaux, signe d’un début agacement.
« Elle ne doit pas beaucoup t’apprécier non plus, tu t’es conduit comme un mufle ! »
« C’est elle qui a… » tenta de se justifier le dragonnier.
« Fichu tête de mule que tu es, le coupa l’animal. Trop fier pour voir les choses visibles. A cause de ton orgueil, elles te deviennent invisibles. »
« C’est du charabia, Thorn. Que veux-tu me dire ? »
« Cette gamine. Elle te ressemble beaucoup. La première fois que j’ai lu dans son esprit, je n’ai pas cherché à savoir mais…je pense que ce qu’elle a vécu, et peut-être qu’elle vit encore, doit beaucoup ressembler à ce que tu as subi aussi. »
« Oh, vraiment ? » répliqua ironiquement le jeune homme.
Il voulut paraître détaché mais à chaque fois qu’on évoquait son passé, Murtagh se sentait mal à l’aise et sa cicatrice le brûlait atrocement. Il songea aux paroles que la rôdeuse lui avait dit avant de partir. Les raisons de son contrat… Les derniers mots de son dragon le décidèrent :
« Elle VEUT nous aider, Murtagh et peu importe ses raisons, fais-lui un peu confiance ! »
Le jeune homme soupira et se leva :
« Je ne lui ferais pas confiance et je ne vais pas la considérer comme une amie d’un coup, uniquement parce que c’est ton cas ! »
« Ce n’est pas ce que je te demande… »
« En revanche, je te promet de ne pas aller la livrer au roi. Je ne pense pas qu’elle puisse nous aider mais si elle veut perdre son temps, c’est elle que ça regarde ! Et…je vais aller la voir pour le lui dire ! Pour toi. »
« Merci Murtagh ! »
Le jeune homme haussa les épaules mais sourit et caressa sa monture avant de sortir. Il se dirigeait vers l’escalier lorsqu’il entendit des pas.
Calyst grimpa rapidement les marches, réfléchissant à la façon dont elle pourrait se faire pardonner. Sentant une présence, elle releva la tête et le vit. Devant son silence, elle le détailla. Il était grand et malgré ses vêtements amples, elle le savait musclé. Il avait de longues mèches brunes et sa peau était plutôt bronzée, signe d’escapades avec un certain dragon. Ses yeux gris la fixaient avec une pointe de malaise. Elle le dévisagea, cherchant à deviner ses pensées. Puis elle murmura rapidement en détournant les yeux :
« - Pardon pour tout à l’heure…
- Désolée pour mon comportement… »
Elle releva la tête et le fixa, surprise. Avait-elle bien entendu, il avait dit « pardon » ? Il avait un peu rougi mais semblait aussi stupéfait qu’elle. Ils continuèrent de se dévisager avant que Calyst ne tourne les talons et lui adresse un bref signe de salut auquel il répondit brièvement. Lorsqu’ils se séparèrent, un vague sourire étiraient leurs lèvres et, en se couchant le soir, le dragonnier et la rôdeuse se sentirent apaisés.
To be continued...
CHAPITRE SEPT : Mauvais départ
Calyst
Calyst ne put étouffer un long bâillement, un de ceux à s’en décrocher la mâchoire, ce qui lui valut les regards offensés des autres serviteurs. Elle les ignora superbement et se reconcentra sur son balai. Les courbatures de son dos la faisaient souffrir mais ce qui éreintait le plus la rôdeuse, c’était ses séances privées avec son nouvel ami, le dragon rouge. Tous les soirs depuis deux jours, la jeune fille se rendait dans l’abri de l’animal et il lui apprenait à fermer son esprit. Elle subissait ainsi les violents assauts du dragon qui ne lui laissait aucun répit. Elle retrouvait ensuite Kean, qui passait ses journées à récolter des informations et ils allaient dormir chez Thorn, qui avait malgré tout accepté de les héberger. Il ignorait toujours l’existence de Kean, ce dernier étant beaucoup trop paniqué à l’idée de se retrouver en face d’un dragon aussi imposant que Thorn. Calyst sourit discrètement. Face à un dragon tout court, en fait. Quand le soir arrivait et que leurs séances s’achevaient, elle s’asseyait face à Thorn et lui posait des questions sur leurs serments. Parfois, le dragon s’aventurait plus loin que le cadre cordial qui les entourait. Il évoquait alors son dragonnier et lors de ces moments, la rôdeuse ressentait toute l’affection et la fidélité qu’il portait au Parjure. Calyst ne l’avait pas encore rencontré et, bien qu’elle apprécie de plus en plus la compagnie du jeune dragon, elle n’était pas pressée de le voir. La jeune fille prit son balai et sortit de la pièce, songeuse. Elle récapitula mentalement les informations ramassées. L’œuf était dans la salle où le roi ne le quittait des yeux que la nuit. Une vingtaine de gardes prenaient alors le relais et veillaient sur le trésor du tyran. La pièce était alors interdite d’accès à tous jusqu’à ce que le roi y retourne le lendemain. Pour achever sa mission sur le troisième œuf, elle devait pénétrer dans cette salle afin de trouver une faille à ce système de surveillance. Le moins risqué, c’était d’y entrer en plein jour. Calyst grimaça. Cela signifiait rencontrer, même brièvement, Galbatorix, ce qu’elle souhaitait à tout prix éviter. Un cri avait d’ailleurs retentit il y a peu, démontrant que l’appétit du roi en matière de torture ne faiblissait pas. Le seul point positif, c’était que Shruikan l’ignorait désormais et ne tentait plus de l’attaquer. La vieille folle et le cuistot disaient d’elle que la fée des dragons l’habitait. Cela avait viré en plaisanterie et maintenant, il n’était pas rare qu’on l’appelle petite fée lorsqu’on la croisait. La jeune femme avait beau se défendre en clamant haut et fort qu’elle avait un goût détestable, seule raison de sa longévité, on s’obstinait à la considérer comme quelqu’un de bénie, ce qui faisait rire Kean. Toute à ses pensées, la jeune fille ne vit pas le garçon qui sortait discrètement du couloir adjacent et elle le heurta de plein fouet. Tous deux tombèrent lourdement sur le sol et la spontanéité de la rôdeuse prit le dessus :
«- Ca va pas, non ? Vous ne pouvez pas regarder devant vous ?
Elle foudroya le jeune homme du regard. Ce dernier la dévisageait, sans doute surpris par l’agressivité soudaine, avant de répliquer aussi sec :
- Et puis quoi encore ? C’est toi qui ne m’as pas vu arriver, fais donc attention si tu ne veux pas être punie !
Il se releva et repoussa quelques mèches brunes, avant de tourner les talons. Le sang de la rôdeuse ne fit qu’un tour.
- Dis donc toi ! Tu crois m’impressionner avec tes belles paroles ?
Elle imita alors sa voix levant les yeux aux ciel :
- Ouuuuh…fais donc attention, si tu ne veux pas être punie ! Pour qui tu te prends ? Le roi ?
A ces mots, le visage du garçon s’assombrit. Il la regarda et haussa les épaules avant de s’éloigner en boitant. Calyst grogna et se dirigea vers la prochaine chambre à nettoyer. Non, mais qu’est-ce qu’il croyait lui ? Le dernier qui lui avait parlé sur ce ton (et qui n’était pas son père), il était en train de pourrir au fond d’un ravin. Elle soupira. Heureusement, ce n’était qu’un serviteur comme elle sinon…La jeune femme secoua la tête et se promit de rester plus discrète à l’avenir. Ces pertes de contrôles étaient inacceptables, c’était une professionnelle.
Murtagh grommela. Qui c’était cette furie ? Elle lui était tombée dessus et l’avait agressé avant qu’il ne réagisse. Il avait été surpris car elle ne semblait pas savoir qui il était. Ensuite, il avait remarqué son état. Il était sorti de la salle du trône, sa tunique était déchirée et son pantalon troué. Lui-même avait le visage couvert de poussière et la sueur dégoulinait de son visage. La fille avait du le prendre pour un serviteur, ce qui expliquait sa réaction…un peu vive. Lui, trop éreinté de son entrevue avec le roi, avait préféré lui laisser cette manche. Il se dirigea vers l’abri de Thorn où il entra sans un mot avant de se blottir contre lui.
« Tu vas bien Murtagh ?
« Il y va de moins en moins fort. Soit il se lasse, soit il a d’autres choses en tête. Dans les deux cas, cela m’arrange ! »
Le dragon pencha sa grosse tête vers lui et demanda :
« Quelque chose te frustre, je le sens que t’arrive-t’il ? »
« Rien, juste une servante avec un caractère de chien ! On s’est bousculé et elle m’a littéralement sauté à la gorge… »
Murtagh remarqua à peine que son dragon avait détourné les yeux :
« Elle n’a pas froid aux yeux… »
« Une vraie punaise mais je l’ai laissé partir, j’ai vraiment autre chose en tête ! » soupira le dragonnier.
Thorn le regarda longuement avant de proposer d’un ton enjoué :
« Tu te sens d’attaque pour une petite virée ? »
Le visage de Murtagh s’illumina :
« Et comment ! »
To be continued...
Suite chapitre 6
Gryffleyd
La solitude se faisait de plus en plus sentir sans qu’Eragon ne comprenne pourquoi. Il avait l’impression que toutes ses joies, ses bonheurs, ses sentiments heureux quels qu’ils soient, tous étaient aspirés afin de laisser place à un immense froid qui dévorait lentement son cœur.
« Saphira… » appela faiblement le garçon.
Ne recevant aucun réponse, il se laissa glisser contre le mur sur lequel il s’appuyait et s’assit lourdement, ignorant la rudesse du sol. Entourant son corps de ses bras afin de se réchauffer, le dragonnier sentit que tout cela était anormal :
« L’épée… » souffla-t’il.
Un rire aigu éclata, résonnant contre la paroi, ce qui le fit sursauter. Eragon se redressa brusquement, regardant aux alentours.
« - Qui est là ? » cria-t’il d’une voix forte.
Il n’avait pu s’empêcher de trembler mais se tenait droit et assuré dans la pénombre de la grotte. Cependant, même en plissant ses yeux d’elfes, il ne voyait absolument rien. Soudain, il perçut une ombre glisser autour de lui. Il voulut identifier l’intrus mais il se heurta à une conscience désorganisée, envahie de chaos. C’est alors que les paroles d’Oromis lui revinrent en tête :
- Vous êtes le gardien de l’arme !
Cette fois, la conscience s’agita de telle manière que toute la grotte trembla. Eragon leva ses mains pour se protéger des gravats qui tombaient du plafond en pierre. Lorsque les parois s’arrêtèrent de vibrer, une voix grave résonna :
- L’arme ?
- Oui, l’arme qui est ici, répondit le dragonnier. Vous en êtes le gardien, n’est-ce pas ?
L’ombre grandit de plus en plus vite en émettant un long râle.
- Moi, le gardien de cette abomination ?
Eragon recula, effrayé. Mais quelle était donc la nature de ce protecteur ? Malgré le chaos de son esprit, il percevait une part enfouie de sa conscience contenant des fragments d’âme qui lui étaient familiers. L’ombre reprit sa forme de nuages noirs avant de reprendre d’une voix lourde et monocorde :
- Lorsque je suis mort, on a emprisonné mon âme ici, sans mon accord. J’ai erré pendant des siècles et des siècles sans que personne ne daigne jamais me libérer. Qui es-tu ?
- Mort ? éluda Eragon. Cela veut dire que vous étiez humain avant ?
Le même rire strident résonna :
- Humain ? Non, je n’étais pas humain, j’étais de la même race que ceux qui m’ont enfermé : Un elfe !
Elfe ! Ca alors ! Le peuple qui avait le plus cette arme en horreur en avait confié la garde à l’un des siens. Enfin contre son gré semblait-il. Soudain, le dragonnier se sentit envahit de tristesse. Cet elfe avait dû subir maints tourments, ce qui expliquait la folie qui s’était peu à peu emparée de son esprit. Il inspira avant de s’incliner respectueusement :
- Atra esterni ono thelduin.
L’ombre tournoya alors sur elle-même, ce qui pour Eragon devait sans doute être un signe de surprise.
- Mor’ranr lifa unin hjarta onr…souffla-t’elle, avec une once de joie dans la voix.
- Un du evarinya ono varda, acheva le dragonnier.
L’ombre enveloppa alors ce dernier, qui se laissa faire :
- Quel est ton nom ?
- Je m’appelle Eragon Tueur d’Ombre, répondit-il, attendant que l’elfe dévoile son identité.
- Tueur d’Ombre, rien que ça ? ricana ce dernier. Et que viens-tu faire ici, Eragon Tueur d’ombre ?
- Je viens prendre l’épée qui est cachée.
L’ombre effectua une pirouette en riant avant de se placer face au dragonnier.
- T’a-t’on révélé ce qu’elle était réellement ?
- Oui…
- Si tu sais que cette arme est maudite et qu’elle attire la Mort et que tu viens malgré tout la prendre, c’est que tu es fou ou inconscient !
- Et toi, qu’est-ce que tu es ? demanda Eragon, en regardant l’ombre intensément.
En effet, il attendait une réponse, certain que cela lui apporterait des éclaircissements sur sa mission. Pourquoi Maître Oromis était-il si sûr qu’il convaincrait le gardien de lui donner l’épée ? Cela l’intriguait et il vit l’ombre flotter lentement à travers la grotte.
- Je m’appelais Maerzadi…
Eragon eut alors un choc. Ce nom, c’était celui qu’avait prononcé Arya lors de leur voyage vers Ellesméra. C’était lui qui s’était…
-…suicidé lorsqu’il eut la vision de tuer son propre fils. Acheva-t’il à haute voix.
L’ombre l’entoura, agitée :
- Comment sais-tu cela ?
- Quelqu’un me l’a raconté…
L’ombre gronda de rage, emporté par un flot de souvenirs refoulés :
- Tout cela à cause d’elle. On m’avait pourtant prévenu mais j’étais un elfe avec peu d’expérience sur la magie noire. J’ai donc tenté de maîtriser cette épée…
- Que s’est-il passé ? relança Eragon, sentant son hésitation.
- Je suis mort, voilà ce qui s’est passé, Ricana l’elfe avec une pointe de démence. Si tu tiens à ta vie, Shur’turgal, va-t’en !
Le jeune homme resta bouche bée :
- Mais…comment…
- Qui d’autre en aurait besoin ? Qui d’autre aurait la prétention de la maîtriser alors qu’il était empli de doute et de désespoir en posant le pied dans ce sanctuaire ?
- C’était un test ? Cette sensation que j’ai ressenti ? C’était un aperçu des pouvoirs de l’épée ?
L’ombre ne répondit rien, se contentant de flotter devant lui. Le garçon fléchit. Il avait échoué encore une fois. Il n’avait pu sauver Garrow, ni Ajihad et Hrothgar et encore moins son frère. Quel mauvais choix avait fait Saphira en le préférant, lui, plutôt qu’un autre ! Saphira…Le jeune homme secoua la tête. Solembum l’avait dit, il devait chasser ses doutes. Saphira était là et à eux deux, ils avaient tué un Ombre, rencontré des elfes, des nains…Ils avaient voyagé, ils avaient progressé. Il ne pouvait rien faire maintenant ? Alors il s’entraînerait encore. Et il avait Katrina et Roran à sauver. Arya et Nasuada comptaient sur lui. Et si des gens comptaient sur lui, c’est qu’il était capable d’accomplir des choses. Il le ferait avec cette épée et rien d’autre… Le garçon fixa l’ombre, une nouvelle combativité dans le regard.
- Ooooh, applaudit l’ombre. Mais d’où vient une telle énergie ?
- Maerzadi-elda…Cette épée, j’en ai besoin, déclara le semi-elfe en choisissant ses mots avec soin. L’Alagaësia sombre peu à peu dans le chaos mais des hommes, des elfes et des nains se battent pour changer son avenir noir…
- Des elfes et des nains ? Ca mérite le détour, répondit ironiquement l’elfe-ombre.
- Cette épée est le seul moyen de les rassembler et de mettre fin à ce carnage. Montrez-la moi, s’il vous plaît…
- Son pouvoir t’engloutira…
- Je ne suis pas seul, sourit Eragon. Montrez-la moi.
L’ombre resta silencieuse, comme si elle faisait face à un cruel dilemme. Le dragonnier acheva donc de le convaincre :
- Vous avez bien réussi à changer le destin grâce à cette épée. Vous n’avez pas tué votre fils.
- J’en suis mort…répliqua amèrement Maerzadi.
- Vous auriez préféré tuer votre fils ? Montrer que le destin ne peut être contredit ?
- Et toi Shur’turgal, te sens-tu prêt à donner ta vie pour le démontrer ?
Eragon pensa alors à Arya que le destin lui promettait d’aimer mais pas d’en être aimé. A son frère pour qui être Parjure était forcément un destin. Et la prédiction d’Angela qui lui promettait une vie parsemée de peine et de sang. Oui, pour tout ça…
- Je suis prêt à en mourir. »
L’ombre recula alors et un flash aveuglant de lumière illumina le dragonnier qui ferma les yeux. Lorsqu’il les rouvrit, la grotte était constellée de pierres brillantes qui éclairait les parois. Face à lui se trouvait un autel avec des bougies, sur lequel reposait un long étui. Le dragonnier s’approcha prudemment et gravit les quelques marches qui le séparait du coffre. Sur le bois était gravé un serpent s’enroulant autour d’un lys. Lorsqu’il ouvrit la boîte, Eragon ne put étouffer une exclamation. Elle était large et longue comme son bras, incurvée sur sa fin, tel un dard menaçant. Trois minuscules lames s'en échappaient, faisant penser à une énorme griffe de dragon. Son pommeau argenté représentait un serpent mais s’enroulant autour de l’épée jusqu’à avaler la lame. Elle était vraiment magnifique et surtout :
« Sa lame est bleue ! » constata Eragon avec joie. Néanmoins, une petite voix lui chuchota « destin ».
C’est alors que la voix de Maerzadi retentit :
- Si je ne t’en avais pas senti capable, tu serais mort sur le champ. Elle est bien trop dangereuse pour être laissée entre les mains d’un débutant. Je ne te considère pas comme un sauveur, Eragon Tueur d’Ombre. Mais je suis curieux de voir ce que tu vas réussir à faire !
- Merci Maerzadi-elva, dit le dragonnier en s’inclinant. Je ne manquerais pas à mes devoirs.
- Si tu le fais, crois-bien qu’Islanzadi t’enfermera ici à ma place. Elle l’a déjà fait…
Eragon hocha la tête. Il se doutait bien que la reine le ferait surveiller et au moindre comportement suspect, elle l’emprisonnerait sans aucune hésitation.
- Adieu maintenant, Shur’turgal. Mon devoir est accompli.
- Attendez ! Comment dois-je…
- Gryffleyd t’apprendra elle-même comment elle fonctionne !
Gryffleyd, c’était donc son nom. Eragon sourit avant de déclarer :
- Sé mor’ranr ono finna !
Ce fut un rire strident qui lui répondit avant que la présence de l’elfe ne s’évapore doucement. Le dragonnier s’approcha alors de l’épée et la saisit délicatement entre ses doigts.
« Elle est légère… »
Il effectua quelques mouvements avec afin de voir si ses membres s’adaptait à cette épée ce qui ce fit sans problème. Elle n’avait rien à envier Zar’roc et il se demandait même si Gryffleyd ne surpassait pas cette dernière en puissance. Eragon pouvait sentir toute la magie phénoménale qui émanait d’elle et s’insinuait doucement en lui. Satisfait, le dragonnier retourna sur ses pas retrouver Saphira. Il n’était pas inquiet pour les pouvoirs de l’épée car, comme l’avait dit Solembum, ils se manifesteraient uniquement lorsqu’il tuerait quelqu’un, ce qui n’était pas pour tout de suite. Il se hissa hors des racines et avisa sa dragonne allongée sur le côté.
« Elle est bleue, Saphira ! »
Mais cette dernière hurla :
« Merveilleux ! Non vraiment ! Pendant que moi, je me faisais un sang d’encre, monsieur admirait la couleur de son épée ! »
« N’exagère pas, tempéra le dragonnier, surpris. Je ne suis resté que quelques heures. »
« Quelques heures ?! »
Saphira fixa son petit homme de ses yeux bleu :
« Eragon, tu y es resté deux jours ! »
Ce dernier resta abasourdi. Deux jours, comment était-ce possible ? Puis il fit un rapide calcul.
« Roran ! Nous sommes sensés partir pour Helgrind dans 48 heures ! »
Sa dragonne laissa échapper un soupir faussement désespéré et s’allongea pour permettre à Eragon de monter.
To be continued...
CHAPITRE SIX : Le Gardien
Islanzadi
Cela faisait deux jours qu’Eragon et Saphira avaient quitté les plaines brûlantes. La dragonne avait violemment protesté en apprenant la nature de l’arme cachée mais il avait réussi à l’apaiser en partie, en lui expliquant que Solembum était digne de confiance et qu’il avait fait cette révélation dans leur intérêt à tous les deux. Ils s’étaient alors envolés en direction d’Ellesméra, tout en discutant de la création d’une telle arme. Avec un pouvoir pareil à leurs côtés, ils pouvaient désormais rivaliser avec le roi. « Ca reste à voir » avait répliquée Saphira, qui voyait d’un mauvais œil que son petit homme aille se fourrer dans des ennuis plus gros que lui. Il était en train de s’assoupir lorsque la voix de son amie retentit :
« Eragon, le Du Weldenvarden est en vue !»
Le dragonnier se frotta les yeux avant de se pencher plus en avant. La forêt, immense et imposante, s’étendait sous eux. Mais ce qui surprit Eragon, c’est qu’il pouvait désormais voir quelques traces des constructions elfiques.
« Comment-est-ce possible ? »
« Oromis et Glaedr ont du faire lever les barrières magiques de telle sorte que nous puissions maintenant voir Ellesméra… »
« Je ne crois pas, il doit s’agir d’autre chose. Le côté positif, c’est que nous pourrons repérer l’arbre et nous y poser directement sans avoir à nous identifier cette fois.»
Mais la forêt était si épaisse que même en plissant les yeux, le dragonnier ne parvenait pas à distinguer des endroits familiers qui l’avait tant marqué la première fois, comme le lac Ardwen. Parfois, leur hauteur lui permettait d’admirer des choses qu’il n’avait pu contempler à sa guise comme Silthrim, qui s’élevait à travers les pins. Il regrettait de ne pouvoir s’y attarder car elle semblait en tout points similaire à Ellesméra. Malgré ces découvertes, Eragon restait silencieux mais Saphira savait que son petit homme ne pensait qu’à une seule et unique chose : l’arme cachée. Le dragonnier ne se sentait pas prêt à l’obtenir et il était terrifié par son pouvoir. Une pression supplémentaire pour un garçon d’à peine 18 ans…
La dragonne s’apprêtait à le réconforter lorsqu’il poussa une exclamation :
« Là-bas, regarde ! C’est la clairière ! »
Un espace dégagé s’offrait à eux, seulement troublé par la présence du gigantesque pin en son milieu. La dragonne, ne sentant aucun obstacle, amorça alors une descente en douceur, soulevant malgré tout de multiples feuilles lors de son atterrissage. Eragon mit pied à terre et regarda autour de lui. Ellesméra semblait morte et sans vie, ce qui l’attrista profondément. Cependant, il ressentait la présence des elfes dans les environs, ce qui acheva de le rassurer. Ils avaient sans doute de bonnes raisons de rester cachés…Peut-être avaient-ils appris pour son ascendance par Arya mais ça l’étonnait.
« Il y a quelqu’un ? » appela-t’il.
Aucune réponse ne lui parvint. Troublé et inquiet, le jeune homme s’apprêtait à renouveler son cri lorsqu’il aperçut Islanzadi qui se tenait derrière lui. Elle était seule et portait des vêtements sombre, ce qui fit penser à Eragon qu’un malheur avait frappé Ellesméra. Soudain, il remarqua l’étrange feux qui brillait dans les prunelles de la reine elfe. Il s’approcha et s’inclina respectueusement. Il se tut, attendant qu’elle prenne la parole mais elle se contenta de le fixer. Mal-à-l’aise il se risqua à demander :
« - Je suis soulagé de voir que tout va bien… En ne voyant personne, j’ai cru que…Que se passe-t’il ma reine ?
La reine soupira et leva ses yeux rougis vers l’arbre.
- Pourquoi ? Pourquoi fallait-il que tu reviennes dans l’unique but de trouver cette arme maudite ?
Eragon releva la tête, interloqué.
- Comment l’avez-vous su ?
- J’ai vu ta discussion avec ma fille ! Elle n’avait pas à te révéler un tel secret ! Seuls les elfes doivent être au courant de son existence. Arya aurait du t’en dissuader, par tous les moyens !
Au fur et à mesure qu’elle parlait, sa voix montait en fureur. Sa fragilité tomba laissant place à une colère et une peur non dissimulée. Eragon réfuta doucement les paroles d’Islanzadi, cherchant à défendre la princesse :
- Ma reine…Arya a fait ce qu’elle devait, c’est un chat-garou qui m’a révélé ce secret ! Je me dois de suivre ce conseil…
En réalité, il regrettait au fond de lui, que les elfes ne le considèrent pas comme un des leurs.
« Eh bien il faut croire qu’une simple transformation physique ne fait pas toi un elfe mais tu le savais déjà, n’est-ce pas ? » intervint Saphira.
« Tu crois que nous sommes surveillés en permanence ? » s’interrogea le dragonnier.
« Je pense qu’elle surveillait Arya et qu’elle n’avait pas vraiment prévu votre discussion… »
- Cette arme, reprit la reine, a été scellée par Evandar lui-même lorsque nous nous sommes rendus compte de son pouvoir…Bien trop puissant pour un roi elfique et toi, jeune dragonnier, tu as la prétention de vouloir la contrôler ! J’ai mis mon peuple à l’abri afin d’éviter une catastrophe et je compte bien te raisonner de gré…
L’air se chargea de magie. Eragon leva la tête et vit le ciel s’assombrir. Inquiet, il regarda Islanzadi qui semblait une toute autre personne :
-…ou de force !
Devant une telle déferlante, le jeune homme prit peur :
« Une arme capable d’effrayer un être aussi puissant qu’Islanzadi… »
La récupération de cette arme ne lui semblait plus être une de ses priorités désormais. Cependant, abandonner une chose qui pourrait se révéler être un atout pour provoquer la chute de Galbatorix…Devait-il affronter la reine ? Soudain Saphira releva la tête :
« Glaedr ! »
« Glaedr ne nous aidera pas Saphira !», répliqua le jeune homme, agacé d’avoir été ainsi interrompu.
La dragonne s’agita :
« Regarde au lieu de dire des sottises ! »
Eragon s’exécuta, curieux, et aperçut un animal en mouvement se rapprocher du lieu de la discorde. Islanzadi aussi l’avait vu car le ciel s’éclaircit et la tension ambiante redescendit d’un cran. Ils s’écartèrent afin de laisser le dragon mutilé atterrir sans encombre. Une fois ceci fait, l’animal tourna sa tête dorée vers Saphira qui entra alors dans une longue conversation avec son maître. Oromis descendit de son dragon et se tourna vers Eragon.
- Heureux de te voir entier, Eragon !
- Je suis content de vous voir Maître !
Retrouver son maître lui procurait un immense sentiment de joie et de sécurité mais le jeune homme restait inquiet. Il revenait non pas pour finir sa formation mais déterrer une épée maléfique, et après cela il devrait de nouveau repartir. Quelle allait être la réaction du vieux dragonnier lorsqu’il l’apprendrait ? Oromis s’avança près de l’arbre Menoa et caressa la cime du vieux pin.
- J’ai appris pour ton épée et également pour Murtagh et ton lignage.
Eragon baissa la tête, honteux. Mais de quoi en fait ? Il ne savait pas trop mais il aurait préféré que son maître l’ignore. Mais le dragonnier elfe s’approcha et lui posa une main apaisante sur la tête.
- Pourquoi t’en faire ? Tu n’es pas obligé de devenir comme « lui »…
- Beaucoup de choses me prédisposent à le devenir pourtant…murmura le jeune homme.
Il était dragonnier comme son traître de père et son frère venait de rallier Galbatorix. Rien n’indiquait qu’il ne deviendrait pas Parjure à son tour.
Oromis sourit.
-Humm…Dans ce cas, peut-être que manier cette épée ne serait pas une si mauvaise chose…
- Oromis ! cria Islanzadi, stupéfaite.
Eragon releva la tête, abasourdi. Son maître, un elfe sensé haïr cette arme maudite, venait de lui donner sa bénédiction pour manier cette épée. Il devait rêver…Islanzadi tremblait de rage mais Oromis leva les mains en signe d’apaisement :
- Calme-toi ! Comment peux-tu être effrayée par une arme dont nous ignorons tout ?
- Comment ? Nous avons eu à la manier une fois et nous avons du faire face à de lourdes pertes !
- Comme c’est le cas pour n’importe quelle arme, malheureusement ! Islanzadi, si tu en as si peur, laisse donc le Gardien sonder Eragon ! Tu lui fais confiance, n’est-ce pas ?
La reine elfe se rembrunit et fixa longuement Eragon avant de rejeter ses longs cheveux noirs en arrière.
- Il sera sans pitié…
- Parfait ! Nous sommes donc d’accord. Si Eragon n’est pas digne de posséder cette arme, le gardien veillera à ce qu’il ne l’obtienne pas !
Eragon sentit l’appréhension le gagner. Un gardien ? Solembum avait omis de le préciser. Saphira gronda :
« La prochaine fois que je le vois, je l’avale ! »
La reine elfe s’éloigna, dans un bruit d’étoffe. Oromis s’approcha et sourit au garçon :
- Maître, vous rendez-vous compte ?
- Eragon, tu avais besoin que l’on te soutienne pour tenter cette…épreuve ! Sache que moi, j’estime que tu es tout à fait prêt à posséder une telle arme !
- Mais vous-même…
- Moi, je n’en ai jamais eu vraiment besoin, sourit le dragonnier. Ne t’a-t’on pas dit qu’il s’agissait d’une épée qui pouvait maîtriser le Wyrd ?
- Arya me l’a dit mais je ne vois pas en quoi cela me rend plus digne de la porter.
- Et bien tu as toujours cette peur indicible de devenir Parjure, non ?
Le jeune homme hocha la tête, silencieusement.
- Cette épée t’apportera des réponses mieux que quiconque ! Elle pourrait bien t’être bénéfique…»
Eragon se tut, pesant chaque mot prononcé par Oromis. Un soutien inattendu et inespéré car désormais, le jeune homme se sentait ragaillardi et en avait presque oublié la présence du gardien. Son maître lui adressa un sourire réconfortant avant de remonter sur Glaedr qui avait visiblement redonné un moral d’acier à Saphira. Eragon s’approcha et s’inclina :
- Merci Oromis-elda pour vos conseils !
-Sé atra orus taùthr garjzla un lìfa! Pardonne-moi de ne pas rester mais tu dois mener cette affaire tout seul.
- Je comprends… »
Glaedr se replia sur lui-même et pris son envol avant de ne devenir qu’un petit point noir à l’horizon. Eragon se tourna vers Saphira qui ronronna avant de déclarer :
« Allons-y, le temps nous est compté ! »
« Tu as raison. »
Le jeune homme s’approcha de l’arbre gigantesque et commença à l’examiner attentivement. Le trou profond de ses racines semblait toujours aussi sombre. Tout à coup, un bref scintillement fit cligner les yeux du Dragonnier, qui s’approcha et s’agenouilla devant le trou béant.
« Saphira… »
« J’ai vu mais je ne pourrais jamais y entrer ! Tu devras y aller seul ! »
Eragon regarda son amie avant d’approuver :
« Je reviens vite… »
La dragonne plongea son regard de ciel dans ceux de son dragonnier :
« Fais bien attention ! »
Ce dernier lui offrit un bref sourire avant de se glisser prudemment à travers les racines du grand pin. Lorsqu’il sentit un sol pierreux, il s’y laissa tomber et tenta de s’habituer à la pénombre.
« Ainsi, il y avait une grotte sous ses racines… » songea-t’il, car il s’agissait vraisemblablement d’une grotte. Des bruits de gouttes d’eau ricochaient par écho, comme une douce mélodie et tout autour de lui n’était que roche et pierre. Eragon n’arrivait pas à comprendre comment un tel endroit pouvait exister, sous l’arbres le plus sacré des elfes, à moins d’évoquer un acte magique d’une grande puissance. Soudain, il remarqua quelque chose qui le mit mal à l’aise. Un silence total, doublé d’une absence de Saphira et d’une présence qu’elle quelle soit. Aucun être vivant, ni même la présence de l’arbre situé pourtant juste au-dessus de lui. Sans doute était-ce lié au maléfice qui entourait cette arme mais Eragon se sentit soudainement seul et terriblement vide. L’absence de sa dragonne se faisait cruellement ressentir et le garçon laissa couler une larme qui s’écrasa sur le sol poussiéreux. Sans sa dragonne, il n’était rien et il ne pourrait jamais manipuler cette épée. Il fallait qu’elle soit là pour le soutenir ou il était perdu. De plus, cette épée n’était pas forcément celle dont il avait besoin.
« Si elle n’est pas bleue, je ne la prends pas… » murmura le dragonnier pour lui-même. Evoquer Saphira ainsi le fit sourire doucement. Tout à ses pensées, le garçon ne vit pas une ombre se former et s’approcher doucement de lui.
Fin chapitre 5
Shruikan
Thorn attendit que les pas s’éloignent pour de bon avant de redéployer son aile. Son dragonnier était profondément endormi contre lui depuis de nombreuses minutes. Il n’avait même pas entendu la fille entrer. Il approcha son museau de la tête de Murtagh et l’examina longuement. Son front était toujours en sueur et il était agité de tremblements. Son ami était arrivé, chancelant, il y a une heure et s’était écroulé sur lui sans un mot. Thorn n’avait alors pas souhaité fouiller dans son esprit, son état parlait suffisamment de lui-même. « Le roi toujours le roi ! » fulminait le dragon. Il se tourna vers le jeune homme qui ouvrait les yeux douloureusement :
« Salut bonhomme. »
Murtagh ne répondit pas et repoussa quelques mèches brunes avant d’essayer de se lever en gémissant mais il retomba sur le sol :
« Tu ne devrais pas te lever ! » le sermonna son dragon.
« Il le faut, le roi ne va pas tarder à me rappeler. Je ne peux pas m’y rendre à quatre pattes…»
Sa voix mourut dans sa gorge mais Thorn le poussa du museau pour lui montrer son affection ce qui le fit sourire faiblement.
« J’y vais… »
« Murtagh… ».
Le jeune homme se retourna, interrogateur :
« Nous finirons par nous en sortir… »
Murtagh haussa les épaules et se détourna avant de sortir. « Il n’y croit plus ». L’abattement de son dragonnier le tuait à petit feu mais il y avait cette drôle de fille. Cette gamine, apparue il y a seulement quelques minutes, l’avait intriguée mais il n’en parlerait pas à son dragonnier. Celui-ci s’inquiéterait inutilement lui disant que jamais elle ne pourrait les aider et qu’il fallait la livrer au roi. Thorn garderait donc cette apparition pour lui. Mensonge par omission était moins grave que mensonge tout court. De plus, il était curieux de savoir si la gamine allait revenir malgré son effroi visible de tout à l’heure. Elle avait visiblement pris sur elle pour parvenir jusqu’à lui, ce qui méritait au moins une minute de réflexion pour s’interroger. Ce qu’il avait vu dans son esprit…La fille ne savait vraiment pas le défendre, ce qui ne faisait aucun doute sur la véracité de ce qu’il avait pu observer. Eragon, le petit frère de Murtagh et Nasuada avaient envoyé la gamine ici pour l’œuf et leurs serments. Thorn savait que le jeune homme, malgré ses paroles lors de l’affrontement, souhaitait plus que tout que son cadet reste en vie. C’était une des rares pensées qui l’empêchait de sombrer dans la folie. Quand à parler à Murtagh, Thorn devait admettre que c’était plus malin de discuter avec lui d’abord, vu que son dragonnier était très têtu. Oui, ça valait le coup d’attendre demain pour voir si l’audacieuse gamine reviendrait.
Le lendemain, Calyst s’attaqua à ses tâches de la journée avec des courbatures sur tout le corps. Et à la fin de l’après-midi, la jeune fille traînait sa mauvaise humeur en chargeant le fameux monte-charge. Elle avait dormi dans un couloir rempli de courants d’air, nettoyé des chambres infectes et tout ce qu’elle avait appris, par l’intermédiaire d’une servante bavarde, c’était que l’œuf se trouvait dans la salle du trône (ce dont elle se doutait déjà) en compagnie du roi. Lui-même était revenu bien plus tôt que prévu, ce qui l’ennuyait profondément. Sans compter ce hurlement à glacer le sang qui avait retenti durant plusieurs heures. La rôdeuse monta donc les marches en grommelant que ce n’était pas une vie lorsqu’elle entendit un souffle rauque derrière la première porte. Elle se mordit les lèvres : toute à ses problèmes, la jeune femme avait complètement oublié qu’il lui restait un dragon à rencontrer et pas des moindres. Pour avoir rencontré le lézard rouge, elle savait que le tueur de servante se trouvait derrière cette porte. Un instant, elle voulut réitérer son acte de la veille : ouvrir la porte, balancer le sac et partir en courant. Mais elle savait que l’animal irait sans doute raconter son exploit au roi et elle ne pouvait se permettre de se faire remarquer. Elle avança donc les jambes tremblantes vers l’entrée qu’elle entrouvrit délicatement. La pièce était si sombre qu’elle crut qu’elle avait mal entendu et que le dragon n’était pas là. Elle s’avança donc prudemment. La porte se ferma brusquement et Calyst lâcha le sac de nourriture, terrifiée. Devant elle, se tenait un dragon du noir profond des ténèbres. Il faisait le double de la taille de Saphira, les yeux injectés de sang. Ses griffes et ses crocs étaient terriblement acérés et des traces de sang y étaient incrustées. Du souffle sortait de ses naseaux et empestait l’air putride. Il s’avança d’un pas lourd vers elle mais la jeune femme resta tétanisée. Il la renifla rapidement avant de renâcler et de lever une patte énorme, armée de griffes.
« Je suis fichue ! »
Elle allait s’abattre sur elle, la tranchant sur le coup lorsqu’un formidable rugissement retentit. Calyst rouvrit un œil et profita de la surprise du dragon noir pour s’enfuir. Elle courut vers la seconde porte et l’ouvrit avant de la refermer, haletante. Elle aperçut alors le dragon rouge qui regardait au-dessus d’elle en grondant.
« Il me protège ? »
Oui, effectivement, il la protégeait. Ses grondements menaçants ne cessèrent que lorsqu’il sentit que son acolyte noir n’insistait pas. Il tourna alors sa grosse tête vers la jeune femme et s’approcha pour la dévisager. Calyst ne put se retenir : Elle s'avança et enlaça doucement le museau de l’animal.
« Merci », murmura-t’elle.
Elle ne sentit pas de mouvement de recul et entendit soudain un léger ronronnement. Puis il se dégagea délicatement et la regarda. Une voix grave retentit alors dans sa tête faisant sursauter la rôdeuse :
« Pourquoi accepter une telle mission si les dragons t’effraient ? »
Elle sourit, remise de sa surprise :
« Les dragons effrayent n’importe qui, je pense ! »
Elle s’assit en soupirant de soulagement, imité par son sauveur :
« Quel est ton nom, petite ? »
« On m’appelle Calyst la rôdeuse. Et toi ? »
« Mon dragonnier m’a appelé Thorn… »
« C’est un joli nom ! »
Elle inclina la tête :
« Ravi de te connaître. »
Le dragon inclina la sienne avant de prévenir :
« Ne crois pas ta mission accomplie. Mon dragonnier est moins avenant que moi. »
La jeune femme haussa les épaules :
« Tant pis, je me débrouillerais. De toute façon, je ne comptais pas sur toi ! mentit-elle honteusement. Je veux juste lui parler ! Ton dragonnier adresse la parole aux servantes ou il est trop prétentieux ? »
Thorn lui jeta un regard mauvais et la jeune femme se mordit la lèvre. Ca lui avait échappé. Il est vrai que dans sa tête, il était clair que le dragonnier de Thorn était quelqu’un d’orgueilleux, mauvais et surpuissant. Comment expliquer cette volonté de rester avec le roi sinon ? Mais après tout, Nasuada l’aimait, ce fichu parjure et Eragon, qui n’était pas méchant, prétendait le sauver. Sans compter Thorn, qui venait de la défendre. Peut-être qu’elle devait réviser son jugement. La jeune femme inclina donc la tête en signe d’excuse :
« Je te demande pardon, ce n’est pas à moi de juger vos actes ! J’ignore ce qui vous est arrivé, vous aviez probablement de bonnes raisons… »
Même si elle ne voyait pas bien lesquelles, elle préférait malgré tout se faire pardonner afin de pouvoir mener sa mission à bien. Le dragon ne répondit rien, se contentant de répondre à sa question d’un ton neutre :
« Je pourrais lui parler de toi mais il est si méfiant qu’il est capable de te faire rechercher pour t’amener au roi dès qu’il saura tes intentions ! Il va fouiller dans ta mémoire et il n’aura aucun mal à le faire ! »
« Parfait, il verra que je suis pleine de bonnes intentions. »
« …Et que tu veux voler l’œuf. »
« Je ne veux pas le voler, je veux juste me renseigner, corrigea la jeune fille, le doigt en l’air. Nuance ! »
Thorn renâcla :
« Peu importe ! Son serment l’obligera à le révéler au roi. Il doit trouver Eragon et le ramener vivant au roi mais il doit aussi protéger l’œuf. Ce sont nos deux serments premiers, gamine. Non, tu signerais ton arrêt de mort en faisant ça ! »
La jeune femme grimaça. La douleur de l’inquisition de Thorn était encore très présente, comme marquée au fer rouge dans son esprit. Comment faire pour empêcher le dragonnier d’agir ? Une idée sortie de nulle part jaillit dans son esprit.
« Tu pourrais m’apprendre ? » demanda-t’elle avec une lueur d’espoir.
Le dragon secoua la tête :
« Tu rêves ! »
« Pourquoi ? Aucun de vos serments ne me concernent, je pense ! Thorn, je peux vous aider à vous en sortir ! Aider ton dragonnier ! » ajouta-t‘elle.
Le dragon sentit alors que la jeune femme allait être très difficile à raisonner ce qui pouvait lui valoir beaucoup d’ennuis et il en avait déjà suffisamment. Mais il n’avait pas le choix…pour son bonhomme. Calyst avait raison, elle était ici pour les aider et un renfort supplémentaire ne serait pas de trop. Thorn soupira intérieurement : il aurait deux bornés à surveiller et leur rencontre risquait d’être…explosive, c’était le mot. La rôdeuse le tira de ses pensés :
« Au fait, je peux dormir ici ? C’est plus confortable qu’un vieux couloir ! »
Oui vraiment, son pauvre dragonnier pourrait bien aller de surprise en surprise avec elle.
To be continued...
CHAPITRE CINQ : La rencontre
Thorn
Calyst soupira en secouant sa longue chevelure. Cela faisait plusieurs heures qu’elle et Kean avaient atterri à Uru’Baen. La créature s’était retransformée en petit singe afin de passer inaperçu et la rôdeuse s’était fondue parmi la population comme elle savait si bien le faire. Lorsque son ami avait appris le petit « extra » qu’elle devait faire, il avait voulu faire demi-tour. Mais la jeune fille avait réussi à l’apaiser en partie, en affirmant que plus vite ils y seraient, plus vite ils repartiraient. Ils étaient donc arrivé la veille avec un peu d’avance due à la motivation soudaine de Kean. Depuis, la rôdeuse s’était posée dans une auberge proche du château et avait tendu l’oreille pour saisir une occasion de pénétrer dans la forteresse, perchée au-dessus du village. Elle devait bien admettre que ce village la mettait mal-à-l’aise, il sentait la Mort comme l’avait si bien dit Kean. Les maisons étaient noires de cendres, les gens toujours habillés de sombres avec des mines de circonstance. Les seuls animaux, exceptés les bêtes réservés à l’agriculture, étaient les corbeaux qui jalonnaient le ciel. Et lors de sa première nuit à l’auberge, elle avait entendu un cri de souffrance s’échapper des hautes murailles, suivi de près par un formidable rugissement. Ce matin, l’aubergiste lui avait confié d’un air mystérieux que c’était chose fréquente car le roi s’adonnait à son divertissement favori tous les soirs. Calyst descendit dans la salle commune de l’auberge et s’assit dans un coin reculé. Alors qu’elle dégustait son petit déjeuner, elle surprit une conversation entre deux paysans. Visiblement, l’un des deux était passablement éméché, surtout si tôt le matin.
« - C’est à midi qu’ils viendront ! Quelqu’un qui travaille au château me l’a dit ! Une des servantes a été retrouvé morte ce matin, déchiquetée par un dragon ! Encore un coup du Parjure, j’te l’dit !
Il reprit une rasade avant de s’essuyer la moustache :
- Mais y m’prendront pas ma petite Kaden ! Ca jamais !
- Tais-toi, tu parles trop fort ! »
Son compagnon avait en effet noté le regard intéressé de la rôdeuse. Mais celle-ci avait compris qu’elle pourrait bien tirer avantage de cette erreur de discrétion. Elle se leva donc de sa chaise en prenant soin d’emporter avec elle son pichet de vin et s’assit sans plus de cérémonie à la table des deux hommes. Le premier, à la moustache, était roux et costaud mais on pouvait cependant remarquer qu’il était très agité. Le second était un grand gaillard blond plus posé. Une longue cicatrice lui striait le visage son regard s’assombrit lorsque que la jeune femme poussa le vin vers eux.
« Bien le bonjour messieurs, s’annonça-t’elle poliment. Soyez sans crainte, je ne travaille pas pour le roi, je viens d’ailleurs !
- Un conseil Mamzelle ! grommela l’homme roux. Retournez-y le plus vite possible où vous survivrez pas longtemps ici.
- Parfait, Répliqua Calyst de sa voix cristalline. Maintenant que les présentations sont faites, nous pouvons passer à la partie qui nous intéresse tous : votre précédente conversation. Je n’ai pu m’empêcher d’entendre ce que vous disiez et j’aimerais savoir ce qui va se passer à midi exactement.
Le balafré lui laça un regard mauvais :
- Et en quoi ça t’regarde ?
La rôdeuse l’ignora superbement en se tournant vers l’homme ivre :
- Je m’appelle Ildan et vous, quel est votre nom ?
En voyant la méfiance qu’elle avait suscité envers l’autre paysan, la rôdeuse avait jugé plus prudent de falsifier son identité.
- Ternon est mon nom…articula difficilement l’interpellé.
- Ternon…que va-t’il se passer à midi et qui est Kaden ?
L’homme blond soupira et se leva :
- J’veux pas être mêlé en quoi que ce soit à c’que tu projettes, étrangère ! Un conseil, sois prudente ! »
Calyst le laissa s’en aller. Ils avaient tous tellement peur du roi qu’il n’irait sûrement pas raconter qu’elle traînait dans les parages. L’homme partit donc sans un regard pour son ami qui plongeait de plus en plus le nez dans son verre. Au moment où il allait dégringoler de sa chaise, Calyst le retint et lui donna quelques claques pour lui remettre les idées en places :
« - Nous parlions donc de ce midi…
- Ce midi…ce midi, jeune fille, soyez loin de ce cimetière ! Le roi…
Il retint un haut-le-cœur avant de poursuivre :
- Le roi va envoyer ses troupes chercher une nouvelle servante pour ses monstres…ses dragons !
L’homme cracha par terre avec mépris, ce qui fit hausser un sourcil à l’aubergiste. Calyst lui fit un geste apaisant avant de chuchoter :
- Une servante ? Juste pour ses dragons ?
- Bien sûr ! Avec l’odeur d’un homme, ils se sentent en danger et sont encore plus redoutables alors qu’une jeune fille…elle peut s’approcher pour leur donner à manger ou s’occuper de leur abri…Voyez-c’que je veux dire ?
Calyst hocha la tête, souriant intérieurement :
- Et comment la choisissent-ils ?
- Elle doit être jeune…entre les 15-25 ans…comme ma Kaden…pure et innocente…
Il s’affala et sanglota bruyamment, ce qui exaspéra Calyst au plus haut point :
- Ternon…Y-a-t’il beaucoup de jeunes filles ici ?
- Vous voulez rire ? Celles qui sont encore en vie tentent de tomber enceinte par tous les moyens possibles et d’autres se coupent carrément la main !
La rôdeuse retint un hoquet de dégoût. Pousser les gens à se mutiler juste à cause de deux gros lézards…Elle soupira :
- J’ai peut-être une solution…Je ne suis ni pure ni innocente, confia la rôdeuse avec un petit rire, mais présentez-moi comme étant votre fille et cachez la vôtre aux yeux du roi !
Le paysan releva son visage humide et l’observa pour déceler une trace de mensonge. Calyst crut même qu’il allait lui sauter dessus pour l’embrasser, ce que, heureusement, il ne fit pas.
- Pourquoi ? Pourquoi vouloir travailler dans cet enfer ? Je viens de vous le décrire, cela ne vous suffit pas ?
La rôdeuse répondit alors avec le plus grand sérieux du monde :
- Je suis une admiratrice inconditionnelle du roi ! »
*
Quelques heures plus tard, Calyst n’arrivait toujours pas à croire que cela avait marché. En réalité, Ternon, une fois dessaoulé, n’avait pas voulu aller chercher plus loin. Après tout, pourquoi faire, le principale était que Kaden soit sauvée. Il avait donc emmené la rôdeuse chez lui, expliquant le subterfuge à sa femme qui se confondit en larme pour la rôdeuse. La jeune Kaden n’avait sut quoi dire et toutes deux s’étaient réfugiées dans une grange éloignée. La jeune femme avait ensuite revêtu une vieille robe marron et une chemise blanche en toile. Depuis, ils étaient assis dans la pièce commune de la ferme. Ternon faisait les cent pas tandis que Calyst tentait de calmer Kean, caché dans une bourse accrochée à sa taille:
« - Ca fait vingt fois que tu dis qu’on est mort ! Arrête maintenant ! »
« Mais enfin gamine, tu ne te rends pas compte ! Que feras-tu si une autre fille est prise à ta place ? »
« Eh bien, je la tuerais moi-même et je ferais passer sa mort pour un accident. »
Devant le froid qui s’installait, elle sourit :
« Je plaisante… »
« Pas moi ! Tu as entendu ? Les dragons là-haut sont moitiés fous et le jeune parjure doit en tenir une bonne aussi ! »
Calyst fut prise de pitié pour son ami. Kean était une créature très courageuse et puissante sans parler de la sagesse qui émanait de lui. C’était lui qui empêchait la jeune femme de faire des bêtises mais Uru’Baen le transformait littéralement en jeune peureux et elle n’y pouvait rien.
« Je me fis aux indications d’Eragon. De toute manière, je dois parler au dragon d’abord alors c’est parfait. »
« C’est toi qui le dit ! Tu sais à quoi il ressemble au moins ? »
Silence.
« Calyst ! »
« Ca m’est complètement sorti de l’esprit de demander un truc pareil, se justifia la concernée, catastrophée. A la base, on s’en fichait de lui ! »
« Et le parjure ? »
« J’en sais rien non plus »
« Quand ton père et ton oncle le sauront… »
« Tu n’as pas intérêt à leur dire, tu… »
La porte s’ouvrit à toute volée. Une dizaine de soldat entrèrent et encerclèrent Ternon. Leurs armures étaient aussi noires que la nuit et seul le blason du roi, une flamme ardente, ressortait rouge comme le sang. Le plus gradé d’entre eux s’avança :
- Pas de geste inutile Ternon, tu sais pourquoi on est là ! Où est ta fille ?
L’homme roux grommela des injures avant de désigner Calyst, qui restait impassible. Le soldat s’approcha et la dévisagea avant de la contourner. Il la prit par le menton et la força à le regarder :
- Je ne me souvenais pas que tu cachais une beauté pareille ! Un peu trop noble pour être gardienne de chèvre !
Les battements de son cœur s’accélérèrent tandis que Kean s’agitait :
« On est fichu ! »
Mais le guerrier fit signe aux autres soldats :
- On la prend !
Puis en passant devant un Ternon éploré, il ricana :
- Merci pour ta participation aux oeuvres du roi ! »
Calyst se débattit quelque peu, avant de baisser la tête, faussement résignée :
« Trop facile ! » souffla-t’elle à son ami qui grogna.
Elle emboîta donc le pas aux soldats, sans un regard pour son « père ». Cependant une fois hors de la chaumière, elle se retourna et vit un sourire de remerciement se dessiner sur les lèvres du paysan.
*
On l’avait traînée dans les couloirs sombres du château lugubre puis jetée dans la pièce commune des serviteurs. Là-bas, une vieille femme lui avait donné de nouveaux vêtements rouges, aux couleurs du roi, et s'était éloignée en priant les farfadets de veiller sur ce pauvre ange qui allait mourir, broyée par les crocs du démon.
« Vieille folle » souria la jeune femme en enfilant ses vêtements.
On vint ensuite la chercher pour lui montrer en quoi consisterait sa tâche. Outre nettoyer les chambres (ce qui fit ricaner Kean car elle-même n’arrivait pas à tenir la sienne correcte) et faire la vaisselle, une fonction l’intéressa particulièrement : entretenir les deux dragons. En attendant, elle serait nourrie mais devrait trouver un coin où dormir dans le château. En effet, en venant, Calyst avait croisé des serviteurs prenant un peu de repos dans des coins isolés, ce qui l’avait intrigué :
« Kean, j’ai une première info sur le roi ! Il est radin ! »
« Andouille » grogna la créature, toujours cachée.
Elle effectua donc ses tâches consciencieusement jusqu’à ce qu’arrive la fin de journée et la confrontation tant attendue. On la pria de se rendre dans les cuisines où se trouvait un monte charge avec de multiples sacs empestant la charogne. Le cuisinier grogna :
- Il y a un couloir, où arrivera le monte charge. Tu déchargeras les sacs et te rendras dans chacune des deux pièces du fond pour nourrir les bestioles !
Il s’éloigna, grommelant un vague « bonne chance » tandis que Calyst se rendait avec appréhension au dernier étage. Le monte-charge la rejoignit bientôt et elle se chargea d’un sac pesant :
« Reste ici Kean ! »
« Pas question ! »
« Si ils sentent ta peur, on est fichu ! »
« Tu n’as pas peur, toi peut-être ? »
« Je ne la pues pas à des kilomètres à la ronde, en tout cas… »
Elle déposa la bourse et avança rapidement dans le couloir, sans tenir compte des protestations hurlées de la créature. La jeune femme s’arrêta devant la première porte. Elle sentait le souffre mais aucun bruit ne vint troubler le silence. La jeune femme fit taire les battements de son cœur et avança une main tremblante pour toquer. Aucune réponse. Elle s’enhardit alors, ignorant les voix de sa tête qui lui hurlaient de s’enfuir à toute jambe, et ouvrit la porte :
- Mr Dragon ? lança-t’elle timidement.
Personne. Calyst lâcha un gros soupir et balança le sac en plein milieu de la pièce avant de refermer en vitesse et de s’éloigner le plus vite possible. Elle rejoignit Kean qui l’attendait :
« Alors ? »
« Peut-être celui du roi ! Plutôt bien décorée avec son blason sur le mur…sans compter les ossements et les traces de sang incrustées …», énuméra la jeune femme.
« Ca pourrait tout aussi bien être le traître ! »
La jeune femme ne répondit rien et se chargea du second sac avant de se diriger vers la porte du fond. Cette fois-ci, elle entendait clairement un énorme souffle. Elle grimaça avant d’entrer doucement. Mais elle resta figée sur place. Le dragon était vraiment gigantesque et possédait une robe rubis hypnotisante. Ses griffes étaient longues et acérées comme ses crocs tandis que ses ailes s’étendaient majestueusement. Ses yeux noisette la fixaient mais bizarrement, elle ne ressentait aucune animosité. Il n’avait pas du l’entendre car quand elle était entrée, elle avait pu voir qu’il avait rapidement replié une de ses ailes pour cacher quelque chose. Le dragon leva sa tête et la fixa avant de la renifler. Se rappelant que Saphira avait fait la même chose lors de leur première rencontre, elle se laissa faire. Il eut l’air d’approuver car il allongea sa grosse tête et fit mine de se rendormir.
« C’est pour mieux t’attaquer, prends garde ! » rappela Kean qui observait mentalement la scène.
« Tu me fatigues, soupira la rôdeuse. Je ne pense pas que ce soit lui le responsable des attaques ! »
En effet, contrairement à l’autre pièce, celle-ci était éclairée et lumineuse sans trace de folie meurtrière. Le blason du roi était présent mais il avait été déchiré violemment et la paille jonchait le sol ce qui rendait cet abri plutôt douillet. Elle se tourna vers le dragon et fit mine de farfouiller dans le sac. En réalité, la jeune fille cherchait un moyen d’aborder la bête sans se faire attaquer. Se rappelant les recommandations d’Eragon, elle inspira et décida de jouer franc-jeu :
- Je sais…que vous pouvez communiquer avec d’autres créatures même si vous évitez de le faire…
Elle se retourna et plongea son regard sincère dans celui de l’énorme bête :
- J’ai rencontré une de vos semblables ! Saphira…très brièvement.
Un rugissement sourd s’éleva de la gorge de du dragon. Calyst prit peur et leva les mains en signe d’apaisement :
- Je ne vous veux aucun mal, ni à toi ni à ton dragonnier !
A peine avait-elle prononcé ses mots qu’elle sentit une conscience étrangère pénétrer son esprit. Paniquée, elle voulut la rejeter mais cette dernière était bien trop puissante. « Je suis perdue ! ». Le souvenir de sa rencontre avec Eragon fut arraché puis disséqué avec violence. Sa discussion avec Nasuada fut également passée au crible avant que la conscience ne se retire douloureusement. La jeune femme haleta, en sueur, et se laissa glisser le long du mur. On lui avait parlé des intrusions mentales mais en avait rarement subit. Et celle-ci avait vraiment été désagréable. Le dragon grogna d’une étrange façon, ce qui fit penser à la rôdeuse qu’il riait. Elle se releva difficilement avant de répliquer, vexée :
- Je ne prétends pas être une magicienne, loin de là ! Mes talents sont exploités pour d’autres choses comme tu as sans doute pu le voir.
Le dragon désigna l’emblème du roi, ou tout du moins le peu qu’il en restait, d’un mouvement de tête. Calyst sourit, surprise. Rien que par cette intervention, il dévoilait son intérêt :
« Tu n’es pas le dragon du roi, cela se voit tout de suite. Ton abri est…enfin pas comme l’autre…et tu m’as l’air sain d’esprit ! »
La créature souffla bruyamment et Calyst se justifia :
« Enfin, je veux dire…pas du genre à manger les servantes, hein ? Et puis des deux parjures, l’un est fou donc son dragon doit l’être aussi ! »
En voyant que le concerné s’était agité au nom de parjure, elle ajouta d’une petite voix :
« N’est-ce pas ? »
« C’est pour ça que j’aime pas les dragons ! Imprévisibles ! » pensa-t’elle, effrayée. Elle recula jusqu’à être bloquée par le mur. Le hurlement mental de Kean acheva de la décider. Elle tourna les talons et claqua la porte, sous le regard amusé du dragon rouge.
To be continued...
Fin chapitre 4
Arya
Le visage pâle d’Arya acheva d’effrayer Eragon. Elle était visiblement contrariée, très contrariée. Ses yeux étaient sombres et sa respiration saccadée, sans parler des ongles qu’elle plantait férocement dans sa chair. La princesse elfe le poussa dans une tente vide et lorsqu’il vit le peu de mobilier, le dragonnier se dit qu’il devait s’agir de la sienne. Seule une couche improvisée ainsi qu’une chaise et un bureau étaient installés. Arya le força à s’asseoir sur son lit avant de le fixer dangereusement :
« - L’arbre Menoa, hein ?
- Il s’agit de l’arme, celle qui pourrait s’y trouver selon la prophétie. Mais je t’en ai déjà parlé…
- Je pensais que tu avais abandonné cette idée saugrenue lorsque tu as échoué la première fois en voyant qu’elle n’y était pas ! le coupa la jeune femme à la peau d’albâtre. Mais non, tu es têtu…
Eragon avait repris ses esprits. Il analysa rapidement la situation. Il y avait quelque chose qui agitait la jeune femme et visiblement, cela concernait les elfes. Mais la dernière fois, Arya s’était contentée de lui assurer qu’aucune arme ne s’y trouvait, selon elle. Et les elfes ne connaissent pas le mensonge voilà pourquoi l’alarmement d’Arya l’inquiétait.
- Pourquoi te mets-tu dans un tel état ? Tu m’avais dit que tu pensais qu’aucune arme n’y était caché ! demanda prudemment le dragonnier.
- Te rends-tu compte de…Non évidemment ! s’interrompit la princesse en soupirant.
Arya se détourna et se plongea dans ses pensées tandis qu’Eragon s’interrogeait sur la raison de cette colère soudaine. Devant le silence pesant qui s’installait, ce dernier prit timidement la parole :
- Arya…Si tu voulais bien m’expliquer, je pourrais peut-être t’aider !
Voir celle qu’il aimait se torturer ainsi sans qu’il ne puisse rien faire le rendait malade. L’elfe se retourna en le jaugeant du regard. Pourrait-il comprendre ? Puis elle lâcha à contrecœur :
- Quand je suis revenue à Ellesmera., on m’a estimé prête pour entendre certaines révélations.
Arya haussa les épaules :
- Pourquoi ? C’était sans nul doute un vœu de ma mère pour me montrer son affection et la confiance qu’elle me portait…Et peut-être aussi pour préparer sa propre succession. Enfin bref, cela s’est passé après l’Agaeti Sangrhen, ce qui explique mon ignorance lorsque nous étions devant l’arbre Menoa !
Elle le sonda du regard mais Eragon tint bon. Malgré tout, il ne pouvait s’empêcher de se demander comment Solembum avait bien pu l’apprendre.
- Sais-tu de quelle arme il s’agit ? Et pourquoi elle est placée ici ?
Le dragonnier secoua la tête :
- Non, comme tu le sais, on m’a juste révélé son emplacement.
Arya soupira :
- Il s’agit d’un très ancien secret que garde jalousement le peuple elfe. Cette arme, c’est une épée comme tu t’en doutes. Néanmoins, c’est une lame quelque peu spéciale. Pour nous, elfes, il s’agit d’une épée tabou ! Voilà pourquoi nous l’avons cachée dans les racines du grand Menoa, l’arbre sacré ! Ainsi, son pouvoir maléfique ne peut grandir, ni atteindre qui que ce soit !
- Maléfique ? grimaça Eragon.
Après l’arme d’un Parjure qui avait assassiné des dragons, il ne se voyait pas posséder une épée maléfique.
- Oui. Cette arme a été crée dans un unique but : maîtriser ou plutôt asservir une Essence...Une essence toute entière, qui se trouve en chacun de nous, les elfes, les humains, les dragons et toutes les créatures de l’Alagäesia.
La princesse elfe marqua une pause, le laissant assimiler cette nouvelle. Une essence ? De quoi pouvait bien parler Arya ? Il demanda des éclaircissements :
- Je n’ai jamais entendu parler d’une essence quelconque que nous posséderions ! Peux-tu t’expliquer ?
- Je ne pense pas que cela soit une bonne idée ! Tu n’es pas assez…sage pour saisir la signification de cette arme !
Eragon la dévisagea avant de répliquer aussi sec :
- Arya, c’était un chat-garou qui me l’a révélé, tu le sais, et je ne pense pas qu’il avait de mauvaises intentions ! Je devais le savoir !
En lui disant cela, le dragonnier espérait qu’elle le croirait et ainsi, qu’elle accepterait de lui révéler le fin mot de cette histoire.
- Vraiment ? ironisa Arya.
La princesse elfe soupira. Evidemment, ça ne l’avançait pas beaucoup sur ce qu’elle devait faire mais le ton sincère de son ami fit tomber ses dernières réserves de méfiance. Mais une question subsistait dans l’esprit d’Eragon. Comment se faisait-il que Galbatorix ne convoite pas une arme pareille ? Il s’apprêtait à demander des précisions lorsque la jeune femme poursuivit son récit :
- L’existence de cette épée n’est pas le plus monstrueux bien que cela reste aberrant ! Cette arme a été crée à partir de différents cœurs, tous issus d’un individu magique mais surtout de grands seigneurs de leurs races : Cœur de dragon, d’humain, d’elfe…acheva-t’elle avec une grimace de dégoût. Tous assassinés afin de permettre à cette…chose de naître des flammes du volcan d’Aldär !
- Qui a orchestré tout cela ? demanda Eragon, la voix tremblante.
- Nous l’ignorons toujours ! Tout ce que nous savons, c’est que cet acte date du commencement de ce monde.
Le dragonnier frissonna. La princesse elfe le fixa :
- Tu as encore beaucoup de chose à apprendre, Argetlam ! As-tu compris ce qu’était l’Essence que j’avais évoqué ? L’Unique comme nous l’appelons ?
Eragon secoua la tête, déboussolé. Une unique essence ? Oromis ne lui en avait jamais parlé.
- Il s’agit d’un fluide qui coule dans notre corps, chez chacun de nous, êtres insignifiants de ce monde. Il nous relie et une seule action atteint chacun d’entre nous. Nous pouvons, grâce à lui, accomplir les choses qui font ce que nous sommes, qui nous constitue ! Ceux qui manipulent l’ancien langage le nomme Wyrd !
Le jeune homme ouvrit des yeux ronds :
- Wyrd ? Destin ?
Arya acquiesça :
- Le Destin ! Le Destin qui nous détermine dès notre naissance. Comprends-tu à présent ? Si cette arme est manipulée, c’est toute cette terre qui en sera perturbée sans parler du futur ! Imagine quelqu’un dominant le Destin des autres : Il n’y aurait plus aucun libre-arbitre !
Décidément, Eragon ne comprenait plus rien :
- Mais enfin, le Destin n’est-il pas justement le contraire de libre-arbitre ? On ne choisit pas sa destinée ou ce qu’il va nous arriver, c’est le Destin qui nous fait tel que nous sommes sans que l’on ne puisse le changer !
C’est ce qui avait convaincu Murtagh de rester aux côtés du roi. Le destin d’un fils de Parjure…Mais Arya secoua la tête, un peu désespérée :
- Vous, humains, vous confondez beaucoup de mots qui vous induisent en erreur ! Ce que vous appelez destin n’est rien d’autre qu’une notion de chance ou de fatalité mais ce n’est en rien le fait du Wyrd ! Tu pourrais penser que c’est ton destin d’être Parjure puisque ton père et ton frère le sont ! Mais en réalité, il ne s’agira que d’un acte isolé mais malheureux qui te fera enchaîner d’autres actions pires encore avant que tu ne te dises, abattu, que c’est le destin ! Tu t’y résigneras en te disant que cela ne peut-être changé et ainsi vont les choses ! Tu auras tort ! Ou inversement, tellement de chance que tu te reposeras dessus en te disant que c’est ton destin d’être…(elle esquissa un geste évasif )…heureux jusqu’au jour où elle t’abandonnera !
- Mais alors si ce n’est pas ça, qu’est-ce que c’est exactement le Wyrd ?
- La Vie. La conscience d’être en vie. La conscience de pouvoir faire ses propre choix.
Tout tourbillonnait dans sa tête. De nouvelles notions venaient de s’ajouter à ses connaissances et il se sentait irrémédiablement minuscule face à ce Savoir qui s’insinuait en lui. Elle avait raison, il avait encore beaucoup de choses à apprendre. Sentant son trouble, la princesse s’approcha et s’assit près de lui. Son odeur tira Eragon de ses pensées.
- Comprends-tu pourquoi cela doit rester secret ?
- Oui, ne t’inquiète pas ! Je ne trahirais pas ta confiance, tu as ma parole !
Arya sourit faiblement avant de demander :
- Je crois me rappeler que c’est un chat-garou qui te l’as dit…Disons que la révélation mérite réflexion. Si tu sais où le trouver, demande-lui pourquoi il a fait une telle chose et si ses arguments sont recevables, alors oui…Peut-être qu’un retour à Ellesméra s’impose…
- Mais tu viens de me démontrer que cette arme était dangereuse ! Comment pourrais-je m’en servir ?
La princesse posa doucement sa main sur celle de son ami :
- Beaucoup de choses nous échappent dans cette histoire, Eragon. Qui a fabriqué cette épée ? Comment une telle puissance a pu être crée ? Il est évident qu’il ne s’agit pas d’une légende mais des rumeurs ont pu s’ajouter au secret originel afin de décourager ceux qui souhaitaient s’en approcher ! Mais j’ai confiance, Shur’tugal !
Elle s’approcha de son oreille et murmura :
- Tu n’es pas n’importe qui…
Puis elle se leva rapidement et avant de sortir, elle lança :
- Retourne voir ton chat-garou ! Il t’apportera plus de réponses que moi !
Eragon sourit doucement :
- Merci pour tout Arya ! »
Cette dernière s’inclina légèrement et sortit de la tente d’un pas léger, laissant le garçon à ses réflexions. Il voulut contacter Saphira mais elle devait être bien loin car il ne parvint pas à la localiser. Les pensées se bousculèrent dans sa tête lorsqu’il repensa à la phrase murmurée sur un ton de miel. Oui, il l’aimait cette princesse et il ferait tout pour conquérir son cœur. Le jeune amoureux sourit avant de sortir à la recherche de Solembum.
Il trouva le chat-garou dans la tente d’Angela, cette dernière fabriquant une étrange mixture. Devant l’air concentré de la sorcière, Eragon se figea. Si il empêchait Angela de mener sa potion à bien, elle était capable de l’utiliser sur lui et tant pis pour l’avenir de l’Alagäesia ! Néanmoins, celle-ci releva la tête et un sourire illumina son visage :
« - Eragon, ça alors ! Si je m’y attendais…
- Bonjour Angela.
Le jeune homme jeta un coup d’œil autour de lui :
- Où est Elva ?
- Elle est retournée au Surda, ne t’inquiète pas . Une bonne famille a accepté de s’occuper d’elle. Cette petite n’a plus aucun souvenir de sa mésaventure…
La sorcière le fixa étrangement avant de replonger dans ses mixtures qui dégageaient une étrange odeur.
- Qu’est-ce que vous faites ? s’interrogea le dragonnier.
Angela le regarda étrangement avant de répondre d’une voix faussement désespérée :
- Crois-moi Eragon, pour le bien de notre amitié il vaut mieux que tu l‘ignores !
L’air coupable de la femme fit sourire Eragon qui n’insista pas. Il s’assit près d’Angela et se tourna vers Solembum qui effectuait consciencieusement sa toilette du matin. Comprenant le but de sa visite, l’herboriste replongea dans sa fabrication mystérieuse, sans plus de cérémonie.
« Solembum… »
« Que veux-tu Dragonnier ? »
« On m’a expliqué ce qu’était cette arme. Pourquoi ne pas me l’avoir dit ? »
Le chat-garou se contenta de le fixer avec insistance.
« Je sais que vous, les chat-garous, vous ne répétez jamais vos prophéties mais il s’agit juste d’un éclaircissement ! J’aimerais savoir…supplia le dragonnier.
« Tu t’y serais intéressé sinon ? » le coupa Solembum.
Sûrement pas, songea Eragon. La pensée qu’une telle arme existait le révoltait tout bonnement mais…
« Et maintenant t’y intéresseras-tu ? »
La créature planta ses yeux rouges dans ceux du jeune homme qui soutint son regard :
« Les faits ont changé…J’ai besoin d’une arme et lorsque tu m’as dévoilé ta prophétie, tu savais que ce moment arriverait. Je pense donc qu’Arya ignore des choses que toi, tu sais. Ce qui me pousse à croire que peut-être cette arme est pour moi… »
En disant cela, le jeune homme sondait le chat-garou afin de connaître ses véritables intentions. Solembum darda son regard impénétrable sur le dragonnier :
« Ton elfe a du omettre certains détails en effet car tu as l’air d’avoir une peur bleue de manipuler cette épée. Il n’y a pourtant pas de quoi : je t’ai révélé son emplacement dans un but précis et je ne me trompe jamais, sache-le ! »
Eragon soupira de soulagement. Bien qu’il ne soit toujours pas rassuré à l’idée de posséder cette arme, il se doutait bien que Solembum lui avait révélé ce secret pour l’aider dans sa quête et rien d’autre. A la demande de ce dernier, il raconta donc son entrevue avec Arya. A la fin de son récit, le chat s’approcha du dragonnier et lui planta ses griffes dans le bras, à l’endroit même où la princesse elfe avait introduit les siennes, ce qui fit grimacer le jeune homme :
« Les elfes ont peur de cette arme et c’est bien normal. Son pouvoir est terrifiant et je pense que tu l’as compris ! Ils l’ont donc enterrée sans chercher à savoir si c’était exact ou si on pouvait la manipuler ! C’est pourtant le cas… »
« Comment le sais-tu ? »
« J’étais là lorsqu’elle a été crée, Dragonnier ! »
Eragon écarquilla les yeux, abasourdi :
« Mais comment est-ce possible ? »
Solembum s’étira longuement :
« Je suis un vieux chat-garou…J’étais présent au commencement de ce monde. »
« Qui a crée cette épée ? »
« Toi…Tu es unique et irremplaçable pour l’Alagaësia…C’est pourquoi je ferais une exception ! Mais je ne te révèlerais qu’un unique secret alors choisis bien ! Veux-tu savoir comment maîtriser cette arme ? Ou le mystère de sa naissance ? »
Malgré sa curiosité de savoir quel esprit tordu avait pu exécuter un tel acte, le jeune homme acquiesça :
« Très bien. Dis-moi comment je peux m’en servir sans que cela n’ait d’incidence néfaste sur les autres. »
Si cela avait été possible, le garçon aurait juré voir le chat-garou sourire.
« Comment fonctionne t’elle ? Comment une épée peut-elle avoir une incidence sur le Wyrd ? Et comment maîtriser un tel pouvoir ? »
« Dragonnier…Cette épée n’a rien de maléfique tant que son possesseur prend bien certaines précautions. Néanmoins, si un jour, le doute habite ton cœur, tu seras perdu, englouti par le pouvoir de cette arme. »
Eragon déglutit. C’était un jeune homme confronté à de lourds problèmes pour son âge. Des doutes, il en avait tout le temps et pas plus tard qu’hier, lorsqu’il se sentait impuissant contre son frère.
« Alors ce sera à toi, et uniquement à toi, de faire taire ces incertitudes mais je crois que tu y parviendras… »
« Comment ? Comment peux-tu en être aussi sûr ? le coupa Eragon. Des doutes, j’en ai tous les jours. Ils arrivent et s’insinuent en moi tel du poison en m’empêchant d’avancer. »
« Et c’est la sagesse qui te fait les reconnaître mais ne les laisse pas t’envahir sinon la peur remplacera très vite le courage qui te caractérise. …La volonté, l’amitié et tous ces sentiments qui font ce que tu es…ce sont eux qui t’aideront dans ta quête ! Regarde ce que tu as fait avec Elva, ricana le chat-garou. Qu’as-tu ressenti ? »
Eragon réfléchit. Joie. Bonheur. Fierté et sentiment d’avoir grandi. Il ne put s’empêcher de songer que cela ne suffirait sans doute pas lorsqu’une voix familière retentit dans sa tête :
« Chasse tes doutes, Dragonnier et tu pourrais bien nous étonner ! »
Eragon sourit et regarda Solembum avant d’oser approcher une main respectueuse près de la tête de la créature. Intriguée, Angela leva les yeux et s’apprêtait à dire qu’il ferait mieux de retirer sa main si il ne voulait pas être appelé Eragon-aux-neuf-doigts, mais à sa grande surprise, le chat ne recula pas. Il renifla la main tendue puis ronronna lorsque celle-ci se glissa dans son pelage. Angela rit doucement :
- Tu vieillis, gros matou ! Je croyais être la seule dans ton cœur !
« Sorcière, siffla la chat. Ce garçon mérite notre respect ! »
« Merci Solembum, souffla Eragon, honoré d’un tel privilège. Je n’aurais plus de doute ! »
« Il en faut pour pouvoir faire tes choix car un choix fait sans hésitation n’est pas un vrai choix. Veille cependant à ne pas te laisser envahir ! »
« Oui, sinon où serait le libre-arbitre ? » Sourit le dragonnier.
« Tu commences à comprendre, parfait ! Passons à la suite ! »
Eragon se concentra. On allait enfin répondre à plusieurs de ses questions. Il eut une pensée pour Saphira. Quand cette dernière apprendrait tout ça, comment réagirait-elle ? Elle refuserait qu’il possède une telle arme, c’est sûr.
« Cette épée…Son pouvoir se manifestera lorsque tu tueras quelqu’un avec. Dès lors, cela aura une incidence sur tes choix. Et ainsi de suite, chaque fois que tu réitéreras cet acte. »
Le dragonnier fronça les sourcils. Il ne voyait pas bien comment une telle chose était possible.
« Tu t’en rendras compte le moment venu. Maintenant, va. Je pense que tu sais ce que tu dois faire. »
Eragon approuva et fit mine de se lever avant de demander :
« Pourquoi Galbatorix ne la convoite pas ? Posséder un tel pouvoir serait grisant pour lui. »
« Il connaît son existence, c’est indéniable mais cette absence de réaction est un mystère, répondit le chat-garou d’un air secret. Ce sera quelque chose à lui demander lorsque tu l’auras en face de toi ! »
L’espace d’un instant, Eragon ressentit une douleur oppressante lui saisir le cœur. Mais le malaise se dissipa bien vite à la dernière phrase prononcée par Solembum. Il s’inclina devant le chat-garou qui le regarda d’un ton pompeux.
« Je te remercie pour tout, Solembum ! »
Son interlocuteur ronronna puis retourna vaquer à ses occupations. Angela le suivit du regard et puis se tourna vers Eragon :
- Que vas-tu faire ?
- Retrouver Saphira puis mettre le cap sur Ellesmera ! » répondit le dragonnier avec un grand sourire.
To be continued...
CHAPITRE QUATRE : L’arbre de Menoa
Fredric
Lorsqu’Eragon s’éveilla, il lâcha inconsciemment un soupir de contentement, ce qui fit sourire Saphira :
« Bonjour petit homme ! »
« Bonjour ! Tu es levée depuis longtemps ? »
« Bien sûr, espèce de marmotte ! Mais j’ai l’impression que je n’aurais pas à te pousser du lit pour te lever ce matin ! »
Le dragonnier se leva et s’étira doucement, un léger sourire sur les lèvres :
« En effet ! Notre action d’hier m’a revigoré, figure-toi ! »
Saphira en grogna de plaisir puis elle reprit :
« Ton cousin est passé ce matin. Comme tu dormais encore, il est vite reparti mais il m’a demandé de te délivrer un message ! »
Eragon se frappa le front tout en se maudissant. Roran…Tout à sa joie d’avoir délivré Elva, il avait complètement oublié de présenter son cousin au maître d’arme. Et Roran aurait eut beau le chercher, il avait ressenti le besoin de monter Saphira et s’était envolé pendant l’après-midi toute entière. Le pauvre devait tourner en rond.
« Qu’a-t’il dit ? » demanda anxieusement le garçon.
« Qu’Orik lui avait fait rencontrer Fredric, hier, car tu étais absent ! » répliqua la dragonne sur un ton de reproche. Il aurait aimé que tu assistes à son entraînement d’aujourd’hui ! »
« Je vais aller m’excuser... » avoua Eragon, honteux.
Il se vêtit donc en toute hâte et sortit rapidement de sa tente, Saphira derrière lui. Le jeune homme remarqua à peine le changement qui s’effectuait dans le campement. Beaucoup de tentes avaient été démontées et les chevaux commençaient à être harnachés afin de leur faire porter le matériel. Les soldats ne portaient plus de cottes de mailles ou de casque et l’ambiance étouffante s’était dissipée pour laisser place à un vent frais et de timides piaillements d’oiseau. Malgré le fait que son dragonnier y était insensible, Saphira s’en sentit galvanisée. L’atmosphère glauque qui régnait depuis deux jours l’avait littéralement abattue mais désormais, elle se sentait une autre dragonne et Eragon devait le percevoir à travers leur lien. Ce dernier se dirigeait à grandes enjambées vers une aire de combat improvisée, d’où résonnaient des fracas d’épées.
« - Eragon ! »
L’interpellé se retourna et avisa le colosse Fredric qui s’avançait vers lui avec un grand sourire. En le voyant, Eragon eut l’impression que sa barbe était encore plus longue, son épée encore plus grande et surtout il ne put détacher son regard des multiples blessures qui tailladaient son torse nu.
« - Fredric, je suis content de te voir ! Que t’est-il arrivé ? demanda-t’il en désignant les cicatrices.
Le géant éclata d’un rire tonitruant :
- Oh ça ? Ne t’inquiète pas, ce n’est rien ! Crois-moi, les soldats de Galbatorix y réfléchiront à deux fois avant d’affirmer que les Vardens ne sont que des paysans armés de fourche ! ajouta-t’il avec un clin d’œil.
Le dragonnier ne put s’empêcher de frissonner en imaginant les dégâts qu’avait du faire le maître d’arme.
- Tu es venu voir ton cousin ? »
Eragon acquiesça tandis que Fredric lui désignait deux combattants à l’autre bout du terrain. Le dragonnier s’approcha en plissant les yeux. Il distingua alors Roran qui combattait un Varden apparemment bien entraîné. Le jeune homme s’était rasé la barbe et dans ses yeux brillait une étrange lueur qui avait remplacé le désespoir d’antan. C’était un nouveau Roran, à en juger par les coups violents qu’il échangeait avec son adversaire d’un jour. Fredric expliqua :
« - Il n’est pas mauvais ! Pas aussi bon en épée qu’avec ses marteaux certes, mais pas mauvais ! Il attaque sur tous les côtés et peut riposter rapidement ! En revanche, il défend très mal son côté droit et une semaine ne sera jamais suffisante pour lui faire oublier tous ses réflexes de paysans ! Il vient d’apprendre les bases en fait !
- J’ai bien changé, moi !
« Tu as eu plus d’une semaine pour le faire ! » le corrigea Saphira.
- Sera-t’il prêt pour Helgrind ? demanda Eragon en l’ignorant. Si il ne l’est pas, je préfère le savoir et annuler la mission, alors sois honnête !
Le colosse se gratta la barbe pensivement :
- Ce que tu me demandes est très difficile ! Ce voyage sur Helgrind à seulement deux personnes (Saphira gronda, ce qui le fit sursauter)…Pardonne-moi Shur’tugal, trois personnes ! reprit-il respectueusement. Affronter des Ra’zacs requiert un entraînement d’élite et on n’entraîne pas quelqu’un ainsi en seulement sept jours !
Eragon soupira. Il ne voyait pas comment annoncer la nouvelle à son cousin qui s’était enfin ragaillardi à la seule pensée du raid sur Helgrind. Mais Fredric poursuivit :
- Néanmoins, la rage qui l’habite est le meilleur des stimulants ! Il progresse à grande vitesse et pourrait bien être un atout plutôt qu’un fardeau ! »
Ces derniers mots rassurèrent Eragon. Il se tourna vers son cousin qui effectua un vague salut en le voyant. Celui-ci le lui rendit puis lui fit signe qu’il devait partir. Roran acquiesça et retourna à son duel avec une nouvelle énergie. Le dragonnier s’éloigna du terrain, un sourire enjoué sur le visage :
« Parfait ! La libération de Katrina s’annonce sous de bons auspices, n’est-ce pas Saphira ? »
« En effet ! Nous pouvons désormais nous consacrer aux préparatifs alors ! »
Son ami s’arrêta et la fixa, pensif :
« Justement ! Saphira, je n’ai plus Zar’roc ! Je n’ai plus d’armes, Murtagh me l’a prise ! »
« Crois-moi, Eragon, c’est mieux ainsi ! »
Devant son air renfrogné, la dragonne se justifia :
« Je sais que c’était l’épée de Brom et que, pour cette raison, tu y tenais beaucoup ! Mais elle s’appelait Souffrance et elle appartenait à un Parjure, le plus grand de tous ! »
« Qui est aussi mon père ! C’était le destin que je l’obtienne ! »
« Sottise ! Il fallait qu’elle revienne à un autre parjure (devant l’air blessé de son ami, elle rectifia) ! Contraint certes, mais parjure tout de même et qui plus est, fils aîné de l’ancien propriétaire ! »
« Où veux-tu en venir ? » soupira Eragon.
« Un dragonnier doit avoir une épée de la couleur de son dragon ! Murtagh a une épée rouge comme son dragon, nous n’avons plus qu’à te trouver une épée d’un magnifique bleu avec cependant quelques reflets brillants couleur nuit ! » déclara Saphira sur un ton pompeux, ce qui fit rire son ami.
« En fait, j’y avais déjà réfléchi ! Est-ce que tu te souviens de la prophétie de Solembum, la première fois que nous l’avons rencontré à Teirm ? »
« Bien sûr ! Quand le temps sera venu où tu auras besoin d’une arme, cherche entre les racines de l’arbre dit Menoa ! C’est très énigmatique ! »
« En fait, je comptais profiter de l’entraînement de Roran pour retourner à ce fameux arbre ! Je sais que l’arme n’y était pas la première fois mais depuis que j’ai subi ma transformation, les choses ont peut-être changées ! Et puis cette fois-ci, j’en ai vraiment besoin…» se justifia Eragon avec une lueur d’espoir.
« Tu as raison mais comment vas-tu faire pour la repérer ? Elle doit quand même y être cachée profondément, tu ne pouvais même pas l’atteindre en tant qu’humain ! Et puis on ne sait même pas à quoi cette arme ressemble !»
Le dragonnier rougit, ce qui fit soupirer de lassitude Saphira. Elle voyait bien où son petit homme voulait en venir.
« Tu veux demander à Arya, c’est ça ? »
« Elle doit bien avoir une petite idée ! »
« Je sais que c’est dur mais elle t’a bien fait comprendre sa position ! »
« Sa position, pas ses sentiments justement ! rétorqua Eragon. Et peu importe, je ne la brusquerais pas. J’attendrais le temps qu’il faut ! »
Saphira se retint de dire qu’il pouvait attendre encore longtemps. Pourquoi s’acharnait-il ? L’amour…Elle ne souhaitait pas connaître ce sentiment si cela rendait aussi têtu qu’idiot. Eragon reprit plus calmement :
« Je ne vais faire que lui demander comment je peux obtenir cette fichue arme, c’est tout ! »
« Hummm… »
La dragonne ne semblait pas convaincue mais elle se contenta de l’encourager et s’envola se dégourdir les ailes. Eragon respira. Une question…Il allait juste lui poser une simple question et rien de plus. Le dragonnier se mit alors à la recherche de la princesse elfe, qu’il trouva dans la tente de Nasuada, accompagnée d’Orik et du roi Orrin. Eragon maudit les dieux, le destin, le roi de la malchance et tout ce qui s’acharnait sur ses histoires de cœur. Vu l’assemblée qui se trouvait là, la conversation ne risquait pas de déraper, en effet. Il entendit Saphira se moquer de lui mentalement mais n’eut pas le temps de la rabrouer :
« - Salut mon garçon, que t’arrive-t’il ? demanda Orik.
- Bonjour Orik !
Devant le silence et les airs consternés présents sur leurs visages, il sentit qu’on lui cachait quelque chose. D’ordinaire, le dragonnier n’aurait pas insisté mais étant donné les récents évènements, il se sentait directement concerné. De toute évidence, au vu de leurs réactions, il se devait de poser la question :
- Tout va bien ? demanda-t’il d’un ton respectueux.
Orrin se contenta d’un large sourire crispé mais Nasuada répliqua :
- Que veux-tu Eragon ?
- Qu’y-a-t’il ? répéta Eragon. Le ton restait calme et poli mais il n’admettait qu’une seule réponse.
Tous se concertèrent du regard avant qu’Orik n’avoue :
- Ce n’est rien de grave mais la mission de Calyst risque d’être plus compliquée que prévu !
- Pourquoi ?
Le dragonnier sentit le désespoir envahir son esprit. Il n’appréciait pas plus que ça la rôdeuse mais c’était la seule à être en position d’aider son frère.
- Pendant le temps de sa mission, Galbatorix n’était pas sensé être au château puisqu’il recherche activement le dernier dragonnier ! Voilà pourquoi nous l’avions envoyé durant cette période, il y avait moins de danger ! Nous venons cependant d’apprendre qu’il rentrait à Uru’Baen !
Devant l’air catastrophé d’Eragon, Nasuada tenta de minimiser :
- Je connais Calyst depuis suffisamment longtemps pour savoir qu’elle mènera sa mission à terme, même avec le roi dans les parages ! La discrétion est sa première qualité ! Que voulais-tu ?
Il chassa toutes les noires pensées qui l’envahissaient afin de se reconcentrer sur sa mission.
- Je souhaiterais juste poser une question à Arya, si vous le permettez ! demanda-t’il en s’inclinant légèrement.
Tous fixèrent la concernée qui gardait un visage impassible.
- Et bien vas-y ! Je t’écoute Shur’tugal !
Le dragonnier grogna. Visiblement, Arya n’avait pas envie de se retrouver seule avec lui. Tant pis :
- Cela concerne l’arbre Menoa… »
A ces mots, la princesse elfe pâlit et s’avança rapidement vers Eragon avant de lui attraper fermement le bras et de l’entraîner à l’abri des regards et des oreilles indiscrètes. Le dragonnier sentit son pouls s’accélérer. Qu’avait-il encore bien pu faire de maladroit pour mettre la jeune femme en colère ?
Fin chapitre 3
Kean (forme de singe)
Calyst rouvrit les yeux. Elle était toujours adossée à son rocher et la chaleur commençait à se faire ressentir. « Dans quoi me suis-je encore fourrée ? ». Enfin, une fois sa mission accomplie, la dette de son clan envers les Vardens serait effacée. Plongée dans ses pensées, la jeune femme ne sentit pas la présence qui approchait. Une branche craqua et la rôdeuse se leva, dégainant rapidement son épée :
« - Qui est là ? »
Elle s’approcha des buissons, plissant les yeux. Une petite créature bleue en sortit, en se secouant pour enlever les feuilles coincées dans son pelage, ce qui fit sourire Calyst :
« - Ah c’est toi Kean ! Pourquoi cette apparence ?
C’était une sorte de minuscule petit singe aux doigts fins, aux oreilles rondes et aux yeux de neiges. Son pelage était bleu nuit et sa longue queue se terminait par une flamme azuréenne. La rôdeuse s’agenouilla et tendit la main, sur laquelle il grimpa avant d’escalader son bras et de se blottir contre son cou :
« Salut fillette ! » résonna mentalement une voix grave.
« Tu es en retard ! lui reprocha la jeune fille. Tu aurais pu prendre une autre apparence ! »
« Et manquer de me faire tuer par les urgals qui traînent partout ?! Tu veux ma mort ! »
Calyst sursauta :
« Des Urgals ? Ici ? »
« Partout ! Nous devrons faire très attention ! Où on va au fait ?»
« A Uru’Baen ! »
La créature effectua un petit bond sur le côté pour manifester sa surprise.
« Les Urgals ne seront pas les seules créatures dont nous devrons nous méfier alors ! Si ton père et ton oncle le savait… »
« Je serais plus en danger que face à Galbatorix, je sais ! C’est un contrat un peu dangereux mais réalisable ! »
« Ben voyons ! Je comprends mieux pourquoi tu m’as appelé ! Ce n’est pas à côté ! Tu me racontes ? »
« Oui, dès que nous nous serons mis en route ! »
Kean poussa un grognement qui ressemblait à un miaulement de chaton avant de descendre de son « perchoir ». Calyst se recula tandis la petite créature effectuait quelques signes incantatoires de ses deux mains qu’il posa au sol en murmurant mentalement :
« Moi (Change) »
Une brume blanche l’entoura et lorsque celle-ci se dissipa, Calyst s’approcha de Kean. A la place du petit singe se tenait un énorme tigre zébré de noir et de blanc bleuté. Deux crocs démesurées sortait de sa gueule de part et d’autre et sa queue comportait toujours sa flamme. Deux ailes noires s’étendaient majestueusement dans son dos. Il portait également une longue crinière autour de son immense tête. Seuls ses yeux intelligents étaient restés les mêmes. Il s’accroupit pour permettre à sa cavalière de grimper.
« Merci, nous irons plus vite ainsi ! »
« Sans nul doute ! »
Une fois agrippée à sa crinière, Calyst lui caressa la nuque et le félin s’ébroua avant de prendre son élan et de s’envoler. Enfin, s’envoler n’était pas le terme exact. Il s’agissait en réalité de bonds si gigantesques qu’on avait cette impression de vol. Mais ses atterrissages soulevaient des nuages de poussière si énormes qu’on aurait dit des nuages, surgissant de la terre elle-même.
« Alors tu racontes ? »
Calyst s’exécuta, passant sous silence néanmoins la faveur qu’elle avait accordé à Nasuada. « Il est suffisamment paniqué à l’idée de se rendre à Uru’Baen, inutile d’en rajouter ! » pensa-t’elle.
A la fin de son récit, le félin gronda pour marquer sa désapprobation.
« C’est vraiment du suicide ! »
« Mais non ! temporisa son amie. C’est réalisable et je suis bien payée ! »
« Et comment vas-tu t’y prendre pour pénétrer dans ce château d’une part, récolter tes informations et surtout repartir discrètement d’autre part ? »
C’était un résumé de la situation tellement véridique que la rôdeuse sentit une boule de peur s’installer dans son ventre.
« J’aviserais là-bas… »
« Tu devrais appeler du renfort ! »
« Pas question ! »
Le ton véhément sur lequel elle avait prononcé ces mots fit rugir le tigre.
« Tu vas le regretter ! »
Calyst haussa les épaules et se tut. Elle songea alors à leur destination : Uru’Baen. Lorsque Kean saurait qu’elle devait parler au Parjure, il hurlera et fera tout pour faire demi-tour. Kean avait été trouvé à proximité du château du roi, il y a 50 ans par son propre grand-père. Il l’avait alors ramené près de ses fils et lorsqu’il put parler, ils apprirent d’où venait cette drôle de créature. C’était un jeune chiot à l’origine mais il fut capturé à la naissance par des sbires de Galbatorix, qui commençait ses expériences de magie noire pour son second dragon. Kean servit alors de cobaye à Galbatorix et ses Parjures. Après plusieurs essais infructueux pour le soumettre à ses ordres, le roi l’abandonna, agonisant en pleine nature, ignorant qu’il avait crée une créature unique, capable de prendre plusieurs formes grâce à la magie et d’entrer en contact avec les humains. Mëldran, le grand-père de la rôdeuse, se lia d’amitié avec lui et depuis ce temps, Kean faisait partie intégrante du clan. Après avoir aidé le grand-père, le père puis l’oncle de Calyst, il suivait désormais cette dernière dans ses missions.
« A ton avis, dans combien de temps atteindrons-nous Uru’Baen ? »
« A cette allure-là, nous y serons demain dans la soirée ! »
« Parfait ! »
La jeune femme s’allongea sur son ami et ferma les yeux :
« Le Parjure…Il est du côté de Galbatorix, non ? » demanda Kean.
« Oui, répondit Calyst d’un ton méfiant, pourquoi ? »
« Alors pourquoi l’aider ?
« Il paraît qu’il est contraint par des serments d’obéir au roi ! Détends-toi, on va juste vérifier si c’est vrai, rien de plus ! »
« Humm…Pourquoi j’ai l’impression que tu me caches quelque chose ? »
La jeune fille se fit alors toute petite et prit un air innocent :
« Qu’est-ce que tu vas encore imaginer ? »
« Une fois sur place, se jura-t’elle, je lui dis tout ! Il sera alors trop tard pour faire demi-tour. Il sera bien obligé de m’aider…J’espère ! »
Tous les deux se murèrent dans un long silence, tandis que le soleil déclinait lentement.
To be continued...
Chapitre 3 : Le contrat
Nasuada
Calyst soupira. Cela faisait plusieurs heures qu’elle marchait dans le Surda et il ne la rejoignait toujours pas. La chaleur du désert l’écrasait littéralement. Qu’est-ce qu’il fabriquait, à la fin ? Si elle avait su, elle aurait pris la monture que lui proposait Nasuada, ça aurait été moins fatiguant. Uru’baen était loin, très loin et sans lui, elle n’y arriverait pas dans les temps. Epuisée, la rôdeuse s’assit un instant, adossée à un rocher et observa les alentours. Elle s’était arrêtée près d’un des rares endroits qui comportait de l’ombre. En plus des énormes pierres, des buissons desséchés l’entouraient et le sable grossier s’insinuait dans tous les endroits ce qui irritait la jeune femme. Elle se mit à lors à réfléchir à son contrat. Son entretien avec Nasuada lui revint en mémoire. Contrat…
« - Ce n’est pas un contrat ordinaire !
- Et en quoi est-il différent ? Se rendre dans le château du Seigneur Galbatorix n’est pas chose aisée mais mon clan vous a prouvé maintes fois qu’il était puissant ! Je peux y arriver sans trop de problème, croyez-moi !
La chef des Vardens secoua la tête, les yeux brillants :
- Admettons que tu y arrives…Il s’agit d’un dragonnier et si jamais, grâce à tes informations, nous parvenions à le rallier à notre cause, l’Alagaësia serait…
- Il est prisonnier de serments surpuissants je vous le rappelle, je ne prétends pas les délier ! Coupa la jeune fille, catégorique.
Nasuada planta son regard noir dans les yeux de son interlocutrice :
- Le sort de cette terre ne t’intéresse donc pas ?
- Pas le moins du monde, Rétorqua cette dernière d’un ton calme.
Qu’en avait-elle à faire de ce monde ? Strictement rien !
- Ce qui m’intéresse, c’est de savoir combien je vais être payé !
La jeune femme à la peau d’ébène soupira :
- 1000 maintenant pour tes frais divers et 1000 après !
- Parfait ! J’accepte ce contrat !
En un instant, Calyst sortit de sous sa cape un parchemin vieilli et une plume.
- Signez ici et ici !
Nasuada s’exécuta avant de tendre la feuille à la rôdeuse qui se mordit le doigt afin d’y apposer son empreinte sanglante. Une fois ceci fait, elle se tourna vers la chef des Vardens avec un immense sourire.
- Dites-moi tout !
- Je te l’ai dit, tu dois te rendre à Uru’baen et récolter des informations sur le dernier œuf ainsi que les serments de Murtagh !
Calyst secoua la tête d’un air amusé :
- Tut tut tut ! Je ne vous parle pas de cela mais du dragonnier de Galbatorix ! Vous en êtes amoureuse ? Ce n’est pas très malin !
- Sors de ma tente ! répondit placidement Nasuada.
Néanmoins, le sourire qu’elle tentait de cacher ne put échapper à la rôdeuse qui éclata d’un rire clair.
- Allons ! Tant d’insistance pour que j’outrepasse les termes du premier contrat ! A tel point qu’on a du en rédiger un autre ! Ca ne trompe pas !
- Calyst !
Cette dernière leva les mains en signe de capitulation.
- Comme vous voudrez. Mais je le saurais bien un jour ou l’autre !
Nasuada soupira, ce qui fit regretter la tournure de la conversation à la rôdeuse :
- Au fait, Arya a accepté que l’on te demande quelque chose qui n’est pas dans le contrat !
Calyst se tut, méfiante, attendant qu’elle continue :
- Je pense qu’elle a accepté pour Eragon, afin qu’il ne se disperse pas de ses propres missions !
- De quoi s’agit-il ?
La chef des Vardens la sonda du regard :
- Si tu en as l’occasion, prends contact avec Murtagh !
- Pas question ! refusa la rôdeuse. Et puis quoi encore ? Ca ne fait pas partie de notre accord !
- C’est un non catégorique ?
La jeune fille fit les gros yeux, ce qui fit sourire son amie :
- Evidemment ! Puis-je aimablement vous rappeler qu’il s’agit d’un dragonnier au service de Galbatorix ? De plus, je me trouverais en terrain ennemi, j’aurais suffisamment de problème à remplir ma vraie mission !
Malgré l’air impassible de Nasuada, Calyst sentit sa déception. La princesse murmura :
- Je me doutais que tu la refuserais. Je ne t’en veux pas…
- Mais bien sûr ! ricana la jeune fille.
Devant le silence pesant qui s’installait, la rôdeuse abandonna quelque peu sa position de refus :
- Non plus sérieusement, je peux reconsidérer la proposition si vous me fournissez des arguments valables ! En quoi parler au dragonnier serait un plus pour votre guerre ?
Nasuada se leva et lui tourna le dos en fixant le champ de bataille.
- Ce n’est pas un plus comme tu le dis ! Pas pour notre bataille en tout cas ! C’est…personnel. Pour Eragon comme pour moi…
Calyst éclata de rire puis reprit avec un sourire triomphant :
- Je le savais !
- C’est compliqué. répliqua Nasuada en la fusillant du regard.
- Et VOTRE dragonnier ? En quoi cela peut bien lui servir ?
- C’est son frère aîné, nous venons de l’apprendre.
La rôdeuse croisa les bras, songeuse.
- Enfin bref, nous avons besoin que tu lui parles. Il le faut ! Il a pu expliquer partiellement à Eragon ce qui lui était arrivé mais il reste des zones d’ombre qui nous empêchent de bien comprendre sa situation.
La chef des Vardens lui offrit son regard clair :
- Et surtout est-il vraiment du côté de Galbatorix, comme il le prétend ?
- Si oui, je perds mon temps et vous, votre argent ! coupa Calyst.
- Veut-il être sauvé ? poursuivit Nasuada en l’ignorant. Que compte-t’il faire si il parvient à capturer son frère ? Se battre contre lui ou contre ses serments comme la première fois ? Et…
La jeune femme à la peau d’ébène baissa la tête et murmura pour elle-même :
- Et moi qui suis-je pour lui ?
- Ah…
Calyst prit le temps de réfléchir. D’un côté, ce n’était pas dans son contrat et c’était prendre des risques inconsidérés. Si elle venait à mourir, son clan, déjà très affaibli, aurait du mal à s’en relever. De l’autre, elle connaissait Nasuada depuis longtemps, c’était devenue une amie. Et surtout Ajihad, son père, avait énormément fait pour sa famille. C’était une façon comme une autre de payer sa dette. Après tout, il ne s’agissait que de lui glisser quelque mots et si ça tournait mal, elle fuirait sans se retourner voilà tout !
- Bon, très bien. J’accepte !
A ces mots, la jeune femme à la peau d’ébène se retourna, laissant tomber son masque d’impassibilité :
- Ai-je bien entendu ?
- Oui ! soupira Calyst. Je trouverais votre dragonnier et tenterait une approche mais attention ! Si cela devient trop dangereux, je n’hésiterais pas à tout abandonner sur place, c’est compris ?
- C’est la moindre des choses, énonça une voix froide.
Les deux femmes se retournèrent en fixant Arya, Orik et un autre jeune homme qui était inconnu à la rôdeuse. Cette dernière s’inclina devant la princesse elfe avant de demander d’un ton respectueux :
- Que dois-je lui dire ? »
To be continued...